Les Objets récents de Caude Viallat ressemblent à des grigris. Des talismans de bric et de broc qu’à la manière d’un vieux paysan provençal il accumule en prévision. En prévision de quoi ? Nul ne sait. Mais on n’est jamais à l’abri.

À force de patienter tout ce pan de son travail est rongé par le sel et le soleil. Ce sont entre autres, des morceaux de cordes nouées dans les flots, des bois pelés de leur écorce, des pièces de tissus sur lesquelles ont raviné mille terres ocre et jaunes, de la ficelle rabibochée, des morceaux de chaise désossée et blanchie. Comme le paysage implacable qui les voit naître au travers des verrières de l’atelier, ils ont appris à résister à l’impériosité de la Tramontane et aux brûlures du Marin.

À ces œuvres arrachées à la sécheresse des éléments en succèdent d’autres ; elles, plus en lien avec les tonnelles et la terrasse où l’on sirote un verre, sont parcourues de couleurs vives propres aux tracés italique des osselets artiste. Ces toiles multicolores sont prises dans des Cerceaux avec lesquels les enfants ont peut-être joué. Ils proviennent certainement de petits tonneaux à vin démembrés avant d’être subtilisé et transformé par l’atelier. Une fois associés au mouchoir noué en leur centre ils peuvent servir de pare-soleil. Certains de ces tissus sont d’antiques napperons désormais dressés comme des étoiles de mer. On imagine que dans une autre vie ils virent passer les invités, qui y laissèrent leurs empreintes, imprégnant le macramé d’une huile de coude amicale. Ainsi, chacun de ces objets murmure d’anciennes qualités, réelles ou fantasmées. C’est peut-être de là que provient la superstition qui les entoure. Une forme de symbiose entre la peinture et tout ce qui peut y servir de réceptacle. Chez Claude Viallat la peinture qui ne porte pas de sens intrinsèque s’attache au passage des choses, et, avec elles, prend la route dans le cahotage des ornières et des ruisseaux.