Cet écho que rien ne mettra plus à notre table nous ne le regretterons pas. Il est si souvent venu frapper qu’à présent il semble toussoter comme s’il avait avalé de travers. Ne subsiste que le bruit résiduel de son étourdissement à la recherche d’une caisse de résonnance susceptible de l’actualiser. Mais rien n’est moins sûr.

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Un homme pieds nus fait le bilan. Il n’a plus de compte à rendre, mais dans l’absence l’oubli n’a plus de sens. Il faut se remémorer ; se remémorer que sur l’élastique de nos passions nous ne sommes libres que d’aller et de revenir, et de bout en bout, claquer à la face de celui qui nous tient entre son pouce et son index.

De l’autre côté, aux extrémités de l’élastique, passe du monde et se succèdent des singularités dont on ne sait rien – ou si peu. Les marques serpentines qu’elles laissent à la surface de nos corps à force de jeux reposent sur notre peau comme des cheveux dans la bonde d’un bac à douche. Accumulées avec le temps, ces marques sont devenues la face visible d’un gros chat enrhumé, tapis dans son pelage dont on ne parvient plus à distinguer les poils morts de ceux qui percent à peine à leurs pieds.

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À d’autres tables sont assis plusieurs artistes. Tous ne sont pas encore connus, certains seront oubliés, d’autres verront leur heure plus tard. Ils bavardent avec joie et depuis leur chaise les inconnus qui prennent le thé peuvent entendre les bribes de leurs conversations.