Scandé par d’imposants décors pliants aux armatures métalliques, l’espace de la Halle des Bouchers invite à une déambulation en accordéon. Les couloirs formés par ces décors temporaires situent la visite à l’arrière-scène d’un plateau de théâtre chargé de toiles de fond et d’environnements divers.

Les écrans de sérigraphies que Maxime Rossi utilise pour ouvrir et refermer ces scénettes laissent filtrer les réminiscences de grandes figures de l’Art moderne européen auxquelles ont été associées le graphisme évangélique et flamboyant créé dans les années 60 par une none américaine. À leurs côtés, trois projections diffusent une comédie musicale hybride chantant la remonté du fleuve Congo par une femme chargée de transmettre un message, une magie, au fils de l’homme qu’elle aime et qu’elle vient de perdre. Les silhouettes abstraites sur les écrans deviennent au contact du récit des amulettes chargées d’une mission chamanique. Cette mission presque divine associe comme un delta en crue l’engagement des artistes et de Sœur Corita Kent, chacun porté par le monde nouveau qu’ils entendaient rendre possible par leur action. Ce chatoiement de messages de paix et de joie sillonne entre les décors. Ils forment avec les vidéos une suite de paysages colorés chargés de grelots et de slogans évangéliques que sondent la voix de la chanteuse et la musique qui l’accompagne.

Ainsi cette comédie musicale superpose plusieurs sources qu’elle fait s’interpénétrer. Chacune des femmes qui la compose donne une partie d’elle à l’ensemble pour former une destinée collective qui les dépasse mais et qui rayonne. Il s’agit d’un voyage, d’un chant, un message, organisés par l’artiste pour les rendre mobiles et transposables dans mille autres lieux. Ce théâtre chorale est à l’image de l’immatérialité de son message, il pourrait être replié et tenir dans une grande valise à roulette.