Face à l’entrée se dresse une importante structure métallique faite de volumes imbriqués, certains sont ouverts, d’autres fermés. Ils semblent avoir été associés à la façon d’une malle de voyage dont chaque compartiment dispose de sous-ensembles. Eux-mêmes donnent accès à d’autres espaces conçus de manière à loger, classer et ordonner tout ce qui est indispensable au déplacement des activités humaine. Or cette malle pèse probablement plusieurs tonnes, elle est intransportable. Son titre, Hole, laisse supposer un autre usage, immobile et concentré. Ses tiroirs à double-fond ne sont peut-être que des façades en cascade. Là où l’on s’imagine quatre où cinq niveaux combinés, l’œuvre pourrait en avoir une infinité ; tel un trou se démultipliant non pas sur le vide mais dans le plein, Hole est une convocation à la lenteur, un voyage intérieur. À mesure que l’on y progresse on est invité à abandonner son propre espace physique ; c’est ensuite nos sens qu’il nous faut déployer à la manière de tiroirs que l’on ouvre puis que l’on extrait de leur emplacement ; le voyage se prolonge sous la forme d’une simple intuition de l’espace.

Dans la salle suivante, Antony Gormley offre une représentation de ce que peut être cette concentration déployée. Matrix II est une structure faite d’armatures à béton, un quadrillage en trois dimensions dont la forme suggère celle, en expansion, d’un cumulus. Les abords de cette résille orthonormée se laissent facilement traverser mais, graduellement, à mesure que l’on plonge le regard en son cœur, sa complexité et sa densité augmentent pour finir par se refermer sur le regard que l’on se voit obligé d’abandonner. C’est seulement à ce prix qu’il est donné de poursuivre.

Si cette œuvre permet de comprendre comment se condensent les cinq sens dans le travail de l’artiste, Expansion Field souligne la multiplicité des circulations possibles pour y parvenir. Il s’agit d’une forêt de figures alignées telles des stèles funéraires en acier et de hauteurs similaires. On s’y faufile sans difficultés, les rangs étant suffisamment larges pour qu’une personne puisse y marcher sans se soucier d’heurter une des sculptures. Celles-ci ont été réduites à leur expression de l’espace la plus simple, pourtant elles l’occupent de manières très différentes, le dilatant ou l’atrophiant selon des contraintes propres et uniques pour chacune. C’est l’espace vacant dont les promeneurs font l’expérience. Un espace inversement dilaté et atrophié de celui additionné des sculptures. Prisonnier, le visiteur subit cette ondulation de l’espace, il est contraint de la faire sienne, d’accepter que son corps, même sans variation, puisse être cette multiplicité de volumes permutables.