Chasing the dragon de Jean-Baptiste Lenglet consiste en un grand mur recouvert de copies A3. Ensemble, elles composent la spirale vertigineuse d’une tornade plantée sur la ligne d’horizon de l’espace nu d’une plaine qu’elle plonge dans l’obscurité. Le ciel et ses bouleversements occupent l’essentiel de l’image où les nuages s’engouffrent les uns dans les autres, s’enroulent, boursoufflent et s’agrègent en un compost atmosphérique allant du noir total au blanc laiteux. Posé au pied du mur, le capot d’une voiture accidentée donne une échelle à l’image, et donc une distance à la tornade ; elle se trouve à moins d’un kilomètre. Le capot qui a dû voler en éclats rappelle son passage, mais n’indique rien du sens de progression du désastre.

Peut-être est-il déjà passé. Et dans son sillage Aurélie Pétrel a mis de l’ordre à la volée de bois vert qu’il a laissé derrière lui. Partitions, Fukushima #2, se présente sous la forme d’un tas de panneaux de bois adossés à un mur encombré de tasseaux, de calles de maintien et d’angles. À leur surface on devine des morceaux d’images qui, une fois assemblés, composent une et même image désormais inaccessible. Or l’image n’a pas réellement disparue, elle est démantelée de même que la structure qui lui sert de substrat a été démembrée. Des quelques détails que l’on en perçoit il est possible de tenter une reconstitution. Reconstitution probablement vaine, voire nuisible, l’importance du tas de bois laisse suffisamment entrevoir la destinée d’un tel affichage. Il y a là de quoi présenter une image visible de loin : une publicité.

Moon like heart, (1965-2014) pourrait être l’autre versant de cette construction. David De Beyter y a compilé différents documents relatifs à des phénomènes géologiques. Ce sont des ovales ourlés d’un monticule plus ou moins prononcé : une caractéristique commune, sélectionnée pour la ressemblance qu’elle implique avec les cratères présents à la surface de la lune. Libre à chacun d’y voir une curiosité scientifique, libre encore d’observer les documents jaunis remplis d’indications dactylographiées et manuscrites, libre toujours de se laisser emporter par les images, de voir derrière la foule des signifiants et des associations d’idées qu’elles charrient et immiscent dans nos esprits. Libre enfin de ficeler à ces preuves une théorie édifiante, d’y voir sourdre un complot.