L’exposition des peintures d’Alun Williams à la Galerie Anne Barrault ressemble à un coffre à jouets. Un coffre pour artiste, rempli à ras bord de références picturales de tous horizons et toutes époques. Véritables panoplies, elles y sont entassées, pêle-mêle, avec cette hâte qui caractérise le calme qui succède aux colères parentales survenues à la suite d’une visite inopinée dans une chambre trop mal rangée.

D’un seul coup, toutes les histoires, les hybrides et les gravats accumulés se retrouvent bazardés dans un même sac. Les angelots italiennement primitifs voisinent avec des éclaboussures qui recouvrent Alex Katz, débordent sur Picasso, chevauchent des lutteurs grecs. Buddha, Gaston Chaissac et Richter, pris d’une seule brassée, rangés coûte que coûte avant que le ménage par le vide ne s’abatte sur eux, se retrouvent coude à coude, haletant et pouffant de rire. De ces chevauchements naissent des rencontres amusantes. Le carré noir de Malevitch se transforme en toile de cinéma en plein air, les miniatures persanes samplent leur perspective avec celles des paysages classiques. L’histoire de l’art reconfiguré en fonction des goûts et des attirances de l’artiste ressemble à un carnaval, un grand bal masqué où abstraction et narration échangent leurs attributs, posent et composent des rébus absurdes.

Et pourtant, au milieu de ce patchwork, la peinture de l’artiste transparaît avec ses propres impératifs, sa palette et ses habitudes. Elle agit tel un vernis unissant les éléments entre eux. C’est que tous ces jouets ne sont pas seulement ceux avec lesquels Alun Williams joue, ce sont aussi et avant tout ceux qu’il a lui même fabriqués. En peignant ces différentes manières, en leur donnant une forme reconnaissable il n’a pu faire autrement que de les façonner à la taille de ce qu’il perçoit d’eux. Autrement dit, il les attache à la mesure et aux limites de son regard. En retour, l’observateur face à ces tableaux, quand il en reconnaît les signes, et donc les partage avec l’artiste, peut à son tour leur appliquer les distorsions entortillées de l’appropriation qu’il se fait des références et de l’œuvre qu’il a sous les yeux.