La céramique pourrait être un jeu d’enfant, une activité du mercredi après-midi, joyeuse et exubérante : elle pourrait être bruyante. Pourtant, le plus souvent, elle est silencieuse, baveuse et austère.

Entre les mains de Raphaël de Villiers ce matériau donne au contraire l’impression être vivant. Chargés de formes biffées qui se fondent et se mélangent dans une gestuelle enjouée, les porcelaines et les grés émaillés que manipule l’artiste semblent avoir été aspergés d’eau bénite comme pour une bénédiction publique. Chargées de cet enthousiasme, leurs glaçures coulent de partout et entraînent avec elles maquillages, fards et artifices des personnages qu’elles recouvrent. L’exposition s’apparente alors à une procession à moitié aveuglée, chaque sculpture trébuchant dans ses propres plis, tombant se déformant et se chargeant de mille et un débris – tessons, verroteries, billes et mottes de terre comme s’ils étaient autant de bijoux et de parures à exhiber.

Plein de paillettes et de couleurs fluos qu’enrobe parfois une calotte de verre, le travail de Martin Mc Nulty ressemble, lui, à de la charcuterie en gelée. Génial pied de porc – suave et goûteux comme peut l’être un déjeuner au bord de l’eau quand la fraîcheur des saules s’associent à celle de la rivière –, tête ravigote et oreille panée : on voit ici dépasser un os  recouvert de brisures de sel, ici se creuser un ventricule gorgé de gélatine rose et persillée – ces sculptures n’ont fort heureusement pas d’odeurs. Mais on les observe, un à un sur leur socles, comme des étals un jour de marché-concours, circonspect devant le mystère de ce terroir, parfois dubitatif, bien que toujours stupéfait par l’inventivité qui transforme le hasard en vessies et, réciproquement, la viande en ronde-bosse.