Entre-Deux, l’exposition du MRAC, explore cet espace indéfini qui relie les œuvres à leur contexte et leur sujet. Ainsi, ce sont autant elles que la scénographie qui construisent le propos. Le parcours démarre dans un rez-de-chaussée aux allures de parking sous-terrain, bien éclairé, haut de plafond et ponctué de colonnes.

On y est accueilli par la petite vidéo tremblante aux noirs et blancs virant vers le bleu de Gordon Matta-Clark, Le Sous-sol de Paris. L’artiste y filme des détails de pierres, d’égouts et de crânes. Le déplacement de la caméra, fébrile et haletant, dégage quelque chose d’oppressant, mais en même temps d’assez attendu. C’est avec les installations de Tatiana Trouvé que l’écart qui donne son titre à l’exposition devient perceptible. Par son jeu d’échelle, Polder (2002) fait de portants miniatures, de petits bancs et objets le situant entre hôpital et maison de rééducation, rend instantanément la position de l’observateur ambiguë. Triplement ambiguë même, puisque l’œuvre, trop petite pour être expérimentée, est en même temps inadaptée au lieu, où pourtant elle s’enroule avec l’aisance d’un bernard-l’hermite dans un coquille étrangère. C’est comme si elle rendait visible un espace dans lequel nul autre qu’elle peut se loger. Or, elle même a une matérialité inscrite dans l’espace du visiteur, cet espace qui est aussi celui de la scénographie lui permet d’être intouchable. Tout est noué, impossible face à cette œuvre de convenir d’une posture adéquoite.

À l’étage, changement d’atmosphère. L’espace bétonné et froid du sous-sol est remplacé par un espace ouvert sur l’extérieur et lumineux. Triangle Pavillon (1987) de Dan Graham n’y est que clarté, et prouve par la maigre et inconfortable surface qu’il recouvre que l’espace, même illuminé, est aussi composé de non-lieux. En celà l’installation enferme autant qu’elle montre. La transparence se fait évidence, et dans cette évidence renaît une dualité, un doute.

Les jeux de grilles de Farah Atassi, qui à l’étage du dessous semblaient être aussi anxiogènes que l’atmosphère dans laquelle elles baignaient, ici se remplissent de lumière. Elles s’aèrent comme si dans l’image quelqu’un avait ouvert les fenêtres après un long moment de renfermé. La différence est d’autant plus troublante que le sujet des œuvres est similaire. Or, à bien s’en approcher, à scruter l’épaisseur des couches que l’artiste laisse apparaître, on comprend que la lumière y est retenue, collée par la peinture tel un calque supplémentaire. C’est cette ultime couche que l’on perçoit. De même que précédemment on percevait l’humidité. Par des procédés purement picturaux Farah Atassi réussi à révéler l’interface qui l’entour. Ce fameux écart dont il est question.