Dans l’exposition des photographies de Jean-Luc Charpin au Musée de la Chasse et de la Nature, des chiens, finalement, il y en a peu. Par contre, on y voit la forêt, l’automne posé dessus, l’aube qui la voile, et les feuilles vertes qui s’ébrouent parmi les jaunes, les oranges dentelées de cramoisi, les noirs et les bruns rabougris formant pour elles de confortables matelas.

Une réelle humidité se dégage de ces clichés. La technique employée par Jean-Luc Charpin donne à ses tirages un aspect mât au grain dense qui laisse à leur surface l’aspect de la buée sur le simple vitrage au petit matin. Cette ambiance épaisse est par endroit transpercée de couleurs saturées, des mousses, du sang qui n’a pas encore coagulé, un écheveau de tendons blancs, contrastent et vivifient l’image comme un coup de frais la pâleur de l’aurore encore surchargée de brume. L’eau, elle, est grise et plate, elle stagne un peu dans les rus et les mares basses de cette campagne.

Au centre de l’espace est soigneusement alignée, encastrée dans des creux dégagés à même la cimaise, une suite de photographie grises et de format identique. Elles renvoient à une nature lointaine, une nature d’étain et de porcelaine d’où s’envolent des oiseaux.

Enfin de parcours quelques chiens de race, seuls participants chauds à cette partie de chasse, accompagnent les chasseurs maintenus isolés par l’attente, la concentration et leurs vestes dodues, pleines de plumes et de duvet. On les voit, seuls ou en groupes, la robe encore propre de toute gadoue, guillerets, et prêts à se laisser enivrer par la course brutale et soudaine que déclenchera l’apparition d’une proie. À ce moment ils se jetteront sur elle, détalant de concert parmi les branchages ramollis sur une terre meuble et si pleine d’humus et des milliers d’autres chasses qui eurent lieu à sa surface que se forme, entre elle et les cadavres qui bientôt ne manqueront pas de s’y étendre, un appel organique, un continuum vital absolument inexorable, en un mot, païen.