Corrélation rapproche trois artistes autour de leur tâtonnement des formes : énigme géométrique chez Raphaël Zarka, arrête brisée chez Vincent Mauger, surfaces trompeuses pour Roman Moriceau. Tous les trois aiment et questionnent les formalismes, ils s’en emparent, les triturent et les isolent pour en rendre palpable le désordre intérieur.

Les œuvres des artistes ne sont pas mélangées, chacun occupe un espace distinct. Zarka est le premier. Le visiteur est accueilli par les deux colonnes jumelles en briques rose-orangé du Second cénotaphe d’Archimède. Cette sculpture aux allures de monument à l’antique associe la grande sobriété de son apparence à la multitude des profils que tendent les briques à l’observateur. On la contourne ; on l’observe comme une belle illustration d’algèbre, mais on finit par s’en écarter un peu troublé. Il manque l’explication, le sens que tout dans ce travail semble appeler. Même première impression pour la Déduction de Sharp(1) ; une planche de contre-plaqué adossé à un mur, percée de triangles et de carrés dispersés à sa surface. Étrangement, c’est juste assez simple pour  que l’on puisse y voir une démonstration.

Viennent ensuite les œuvres de Roman Moriceau. Plusieurs sérigraphies et dessins couvrent les murs. Leurs coloris varient entre la sépia et divers gris très chauds obtenus par l’application d’huile de vidange et de chiures de mouches. Les motifs sont des plantes, des fleurs, un monogramme, des nuages, les Alpes et le visage de Kate Moss. Mais ils pourraient être tout autre, la surface fait disparaître le sujet, le regard s’y pose et se dilue presque immédiatement dans l’envie de vérifier si le papier sent encore le garage auto ou pas. Dans ce contexte impalpable, une petite cabane a été disposée au centre de la pièce. Il est permis d’y entrer en écartant un pan de tissu sur son côté. À l’intérieur, l’artiste a installé Commode Louis Confo ; un dispositif lumineux qui s’évertue à nous faire prendre une commode en toc pour un meuble de style.

Le troisième et dernier espace est occupé par Vincent Mauger. On y découvre deux sculptures mécaniques. La plus grande occupe une bonne partie du champ visuel, elle le capte d’autant plus que selon l’angle d’où on l’aborde, elle change radicalement. Son apparence hérissée et menaçante disparaît à peine deux pas effectués sur le côté, là elle n’est plus qu’un doux tourbillon, léger comme un courant d’air.

La petite est plus compacte, plus concentrée. Elle a l’air d’une pierre brute, d’un rouge profond, précieuse. Pétrifiée dans la perspective de son éclosion, elle clôt l’exposition ; tel un bourgeon.