L’exposition de Michel Blazy pour le dixième anniversaire du Plateau commence et s’achève sur de grandes étendues marron. Dans l’entrée, l’artiste a organisé un Lâché d’escargots sur moquette marron ; les gastéropodes sont en charge de décorer la surface de leurs grasses sécrétions. De longues trainées de bave serpentent et dessinent au sol des arabesques qui, si on les longe, nous mènent aux animaux en plein labeur.

À la sortie, la dernière salle est presque entièrement remplie par la Grotte. Une grosse structure recouverte de germes de lentilles, creuse et odorante, et dont la texture s’apparente à une meringue flambée. Les visiteurs sont invités à en faire le tour pour atteindre l’ouverture qui permet de découvrir le calme humide et cotonneux qui règne à l’intérieur.

Entre ces deux extrémités, on retrouve bon nombre des œuvres qui ont fait la renommée de l’artiste, Sculptures d’oranges et autres Paysages grattés ; on découvre aussi une étrange et inédite proposition à venir manger un plat de viande crue dans une salle remplie de moustiques. Les invités, en plein repas, deviennent eux-mêmes le menu des insectes volant formant ainsi un Circuit fermé. Blazy est coutumier d’explorations cra-cra : décompositions, animaux nuisibles, champignons et moisissures font partie du quotidien de son atelier. Ce qui est intéressant dans cette œuvre, c’est que pour la première fois, l’artiste invite les visiteurs à partager ces explorations. Le circuit qui se referme une première fois sur le visiteur, en créant une boucle du sang animal/homme, se referme une seconde fois, en associant dans l’expérience, l’artiste et le visiteur.

Sensations fortes, art-réalité et satiété garanties.

À l’opposé, les Avocat, que l’on trouve mis en lumière de-ci de-là dans l’exposition, ne sont pas les œuvres les plus visibles de Michel Blazy. Ils ont pour caractéristique commune de traîner une branche morte, à laquelle s’est adjointe, par repousse, une nouvelle tige et de nouvelles feuilles pointant vers la lampe qui les surplombe. De plus, leurs pots sont maintenus renversés, ils ont été ébréchés, voire complètement explosés par l’action du gel, gel qui est aussi responsable de la mort de la branche principale de la plante. Cette dualité du mort et du vivant cohabite dans un même trognon. En ce dixième anniversaire du Plateau, l’image est plus qu’un clin d’œil, elle est le signe d’une créativité de traverse, une créativité mue par un formidable héliotropisme, et dont l’incessant compostage donne son rôle à ce lieu.

Joyeux anniversaire le Plateau.