L’exposition du travail de Maria Lobada à la galerie Schleicher + Lange porte bien son nom. Nul ne promet que l’ensemble soit réellement dynamité avant la fin de l’exposition, mais sous leur faux air calme et léger ces travaux ont tous un détonateur.

On pourrait passer devant la première œuvre de l’exposition sans y prêter attention, Ouosvavv se distingue à peine sur le mur de faux marbre qui jouxte l’entrée. Elle est composée des huit lettres du titre recouvertes des mêmes motifs que le mur. De celle-ci on nous explique qu’elles composent un cryptogramme médiéval. Au-delà de l’anecdote, l’anagramme qui se fond dans les veines du marbre est à l’image du goût bien contemporain pour les sigles et autres abréviations abscons – imprononçables et éphémères. On n’en saura pas plus, de toute manière le code est perdu depuis bien longtemps.

Curious and cold epicurean young lady est une gourde suspendue à une chainette. Rien ne nous attire en elle avant de savoir que son contenu exploserait si on l’ouvrait. Le mélange de gaz qu’elle renferme est instable au contact de l’oxygène. Sans cela l’objet est insignifiant. Le récipient prend toute sa dimension une fois que l’on a compris que cette épée de Damoclès attachée à portée de mains et non pas au dessus de nos têtes, restera indéfiniment dans le doute qu’on lui accorde.

Ah wilderness sent bon la forêt, il se dégage de cette pièce un parfum envoutant qui évoque les ballades en forêt et les vacances montagnardes. Sous l’ombre de ces branchages le visiteur se laisse aller à imaginer des bruissements de campagne apaisants, à moins que, plus terre à terre, ce ne soit le parfum des bonbons aromatisés aux Alpes ou aux Vosges. Dans tous les cas, cette jolie touffe pendue au plafond de la galerie exhale avec beaucoup de fraicheur. Pourtant ce sentiment n’est que pure construction mentale de la part du visiteur, la botanique le dément immédiatement lorsque l’on se penche sur la composition du bouquet. En effet, ces espèces ne pourraient cohabiter dans la nature. Mises ensembles elles finiraient par s’empoisonner et rendre le sol impropre à chacune d’entre elles.

Au centre de l’exposition est dressée une table pour 118 convives, mais à vu d’œil on n’y placerait pas plus de six personnes. Tous n’auront donc pas la place de s’assoir immédiatement, on imagine la queue formée par les invités patientant leurs serviettes et leurs ronds à la main. Là encore il s’agit d’une énigme, That’s how every empire falls est à la fois une invitation à la fête par sa forme et le symbole de l’impossibilité de celle-ci par l’exigüité de ses moyens.