Le travail de Rero trouve un contexte amusant en s’exposant dans la galerie Backslash. Les murs y sont archi blancs, le parquet neuf, les néons et l’enseigne extérieure propres, et l’accueil plein d’entrain. C’est sur ce substrat que viennent se greffer les œuvres abandonnées et taguées du street-artiste. Ce mariage de la carpe et du lapin trouve pourtant un liant dans le glissement conceptuel de ce travail.

En fait, le sentiment qui devient le plus pressant au fur et à mesure que l’on visite les deux niveaux de l’exposition est celui de la mascarade. Non pas que l’on soit trompé, l’artiste nous laisse toujours quelques portes de sortie, c’est plutôt que la pacotille singeant la pacotille finit immanquablement par irriter.

L’exposition consiste en une sorte d’inventaire des pratiques à la mode dans l’art contemporain. Il y a un monticule et des miroirs au sol, des livres, de grandes toiles, des trous au mur, des dessins, de la broderie ; autant de béquilles sur lesquelles sont soigneusement appliqués des mots et des phrases, que l’artiste raye. Error  annonce le titre de l’exposition, cul de sac et course en avant aurait-on envie d’ajouter. Ce ne sont pas seulement des constats qu’inscrit l’artiste, il y a là tout un panel de petites provocations, de critiques faciles, et de rejet, un véritable florilège de livres d’or. Ces messages semblent revenir automatiquement, c’est une sorte de fatalité qui s’abat à chaque fois sur le support que choisit l’artiste.

Cet effet de fatalité est redoublé par les ratures qui recouvrent presque systématiquement les mots. L’annonce tombe toujours à plat et est rayée comme pour une liste de courses. À la fin on a vraiment le sentiment que Rero finit par avoir tous les ingrédients dont il a besoin, ou plutôt qu’il les a tous essayés, tous disqualifiés. D’ailleurs la plupart des œuvres sont sans titre, leurs objets sont dérisoires et tagués, les phrases qui les recouvrent fatalistes, et elles-mêmes sont démenties.

Ces préludes seraient amusants si l’artiste nous donnait le change. Sauf qu’en l’occurrence ils cognent sur un homme à terre, et rien ou peu, nous laisse penser que cela n’est pas gratuit. Mais après tout, on peut se dire que c’est un sadisme de bon aloi. On a donc hâte de voir ce que l’artiste dira en suite.