Le Centre Pompidou présente pour la première fois en France une rétrospective de l’artiste américaine. La plus grande partie des travaux présentés ici portent en eux les stigmates imprimés et gravés de toute une vie de revendications politiques et féministes.

Ses œuvres sont peuplées de figures mythologiques. Des femmes surtout, des guerrières, des danseuses, des corps érotisés, offerts et vendus. Toutes ont été récupérées par l’artiste pour être tamponnées et incrustée à sa peinture. Leurs répétitions nous assaillent et l’on ne peut dire si elles gambadent ou si elles fuient. Ces corps, de toutes époques, surgissent sur les papiers et sont immédiatement pris dans un fouillis coloré et incorporé à celui-ci parmi d’autres motifs. Il y a des visages grimaçants et des frises antiques qui se côtoient au milieu de ribambelles de personnages un peu figés, comme pétrifiés dans leurs danses.

Le travail de Nancy Spero peut être vu comme la confluence entre l’école américaine des expressionnistes abstraits qui trustaient la scène artistique dans les années 50 et son désir de ne pas abandonner la peinture à elle-même, de s’en approprier le sens, et d’y plonger sa voix plutôt que son humeur. Ses œuvres, toutes en couleurs, en grands aplats et gestes mélangés, sont envahies de signes. Chaque papier semble avoir été débattu entre la liberté des coloris et la volonté des figures.

L’exposition montre aussi de nombreux des dessins. Ceux-ci, aux couleurs brunes et ocre, portent des traces qui là encore se mêlent aux formes géométriques et aux corps que l’on devine et trouve derrière. Il y a aussi des textes, parfois explicites et souvent poétiques quand ils ne sont pas trop didactiques.

Toute cette exposition paraît montrer le combat d’une artiste hantée par la conciliation de l’art et de ses revendications. Des combats qui l’ont poussée à trouver des formes de créations et de contestations compatibles et efficaces, mais qui s’avèrent souvent laborieux tant ils prennent de la place dans la lecture des œuvres.