Emportée par la boue, gorgée de terre et de débris dans un fracas monstrueux de bruits trouvés, la maison californienne de Wallace Berman a disparu en 1964 de la même manière que l’artiste élaborait son travail. Ce fut un drôle de moment durant lequel tout ce que le sol contenait enfermé pris possession d’une liberté explosive et pleine de mouvements gutturaux à peine caricaturaux.

Ce spectacle naturel se déploya comme une prédiction biblique et s’acheva au petit matin avec l’arrivée de la rosée. Il ne restait rien à sauver, mais cela n’avait que peu d’importance, la maison n’était pas l’atelier, la notion même d’atelier n’avait pas de sens en tant que lieu physique, la continuité de la création, même en pointillés, s’était poursuivie plus loin, chassée à temps par le jeu d’écho des mantras tectoniques précédant la catastrophe.

Avec le temps, les débris de la maison ont trouvé leur place en contre-bas, éparpillés par les intempéries. Là, d’autres maisons ont depuis été construites, des ateliers aussi. Dans celui de Virginia Overton, une solive, une brique et un morceau de cornière sont venus s’empiler verticalement. Par ailleurs, plusieurs fragments de plancher cloués en quinconce sur des planches laissées brutes ont roulé comme des étoiles de shérif pour achever leur course toujours du côté pile : celui qui laisse apparent la partie vernissée et non celle du dessous pâlie par l’humidité.

Dans l’atelier de Will Boone se sont fichés en travers des murs des renforts de charpente. Coincés en diagonale entre les parties préexistantes de la structure ces morceaux ont fini par faire corps avec les cloisons et s’y installer définitivement. Là encore la répétition du hasard leur a donné toujours le même angle, tantôt descendant, tantôt ascendant. La forme de châssis barré d’une diagonale a pris par la suite toutes les couleurs que prit l’atelier. Il y eu du blanc, du bleu, du noir entrecoupés des demi-teintes que le soleil de Californie impose au temps.