Du plafond de la Galerie Hussenot pendent cinq grottes portant des noms d’autos. Rouillées et cabossées, ces petits troglo-mottes marron créés par Jesse Wine sont percés de fenêtres et de portes d’apparence moderniste. Les ouvertures pratiquées par l’artiste ne permettant pas réellement à la lumière de pénétrer, et c’est par en dessous que l’on appréhende le mieux leur cavité. Il suffit de se pencher. Presque impudiquement on peut en observer les ventres ballants ; vidés par le sol et suspendus à des fils comme des cloches à leur corde. Le dedans – à peine le volume d’une tête –, est plus brut que l’extérieur, plus sombre aussi. On n’y mettrait pas la main, mais cela n’a guère d’importance, ce qui s’y trouve n’y est que pour chuter.

En s’éloignant, la forme en cloche de ces objets devient plus évidente. Elle explique aussi leur surface martelée, presque martyrisée. L’artiste a dû vouloir s’en servir lorsque la pâte de ces céramiques était encore fraîche. Ayant perdu leur heurtoir, asséchées de tout son, elles ne sont plus que des enveloppes sans écho et sans autre usage que celui de transmettre et faire grandir chez ceux qui les observent l’anxiété de leur condition éviscérée de pot renversé.

Au sol, un peu comme si elles en étaient issues, cinq paires de chaussures répondent par atavisme à la loi de la gravitation appliquée aux suspensions. Les lacets de ces grandes pointures ont été enlevés. Comme en prison, pour interdire toute fermeture à ces formes à jamais contenantes, les laisser, elles aussi, béantes et passives. Une béance, qui dans ce cas se fait poche et se remplit à la guise et aux aléas de son environnement. La pluie et les regards peuvent de la même manière venir s’y loger, fouiller son volume, y rester le temps qu’ils veulent, avec pour seule contrainte la possible cohabitation avec un bernard-l’hermite trop encombrant ou trop ingrat.

D’autres céramiques occupent l’étage de la galerie. Ce sont ici, plus simplement, des vases, des pots et un buste. Car le corps aussi peut-être considéré tel un creux.