Rien n’est plus surprenant que de découvrir une exposition réussie et généreuse dans une galerie antipathique. Cela arrive pourtant.

La carte blanche à Hector Obalk s’ouvre sur le travail d’Alexandre Lenoir, Cévennes est un grand tableau vertical figurant deux jeunes hommes en bord de rivière : l’un brasse, l’autre sèche recroquevillé sur un rocher. La technique de l’artiste donne à la peinture un aspect étrange, proche de celle qu’ont de loin les rochers anciens envahis par une guerre larvée entre différentes espèces de lichens. L’ensemble est aride, et pourtant toute en fluidité et souplesse. On dirait que la couleur s’est déposée sur la toile comme le font les dépôts calcaires : on la voit glisser et ruisseler de partout, mais elle s’est déjà évaporée. Le cimetière du Moule (Martinique), la seconde toile que présente l’artiste, est un fond de cour ouvert sur un ciel immense où rôdent des nuages bleus comme des vagues.

Viennent les œuvres de Nathanaëlle Herbin ; la première est un Tippy, un cône de tissus blanc entrouvert sur un intérieur orangé. Il est posé sur un sol gris homogène et humide – peut-être du béton. La lumière y entre un peu. De ce que l’on y découvre, il n’y a pas beaucoup plus de place dedans. La même absence pluvieuse caractérise Enceinte. Il s’agit cette fois d’une forêt peinte sous des trombes de pluie. Les silhouettes végétales sont littéralement emportées par le poids des coulées, à leur pied le sol délavé s’enfuit, un limon vert et rouge bave et les déchausse, creusant partout où il peut une mare de vide que remplie l’humidité.

Football, une suite de monotypes d’Ana Gonzales Sola, clos l’exposition. Plongée dans le noir et les nuits de feux de Bengale qui envahissent les stades, elle a extrait des coups de coudes, des drapés lourds de symboles et de revendications, de la clameur et des hurlements qui se répondent, des visages déformés et de la sueur. Les gestes sont vifs, souvent brusques, l’artiste n’hésite pas à rehausser les contrejours pour mettre en valeur la disparition du ballon et du jeu.