Une tête rouge et pleine, des yeux blancs, sans pupille et écarquillés, l’étude de Tête d’homme d’après l’antique ressemble à une apparition, de celle que l’on ne parvient jamais à déjouer. Elle est trop vraie, trop présente, presque trop violente dans sa façon de s’insérer dans notre espace intime. Elle nous fait face.

Ici comme souvent dans les premiers dessins du Parmesan, lorsque le sujet est simplement prosaïque, les figures semblent n’être que de pierre. L’artiste concentre en elles tant d’énergie qu’elles se pétrifient sous une texture sablée d’une extrême finesse. Les grains qui la constituent pèsent comme un rocher sur la feuille, ils s’y enfoncent tendrement, s’éloignant du regard avec solennité. Ce mouvement d’inspiration qui pourrait être un signe de fermeture est contrebalancé par un frémissement, un soubresaut de palpitations qui parvient du plus profond du dessin en direction de l’extérieur et qui donne une vie intime à ces morceaux de statuaires. On est face à eux comme face à des astres. Ils ont l’éternité, mais il fulminent et bouillent en leur for intérieur.

Ces nœuds d’intensité ne se relâchent qu’une fois touché par la grâce des sujets sacrés. Le dessin de Parmesan se fait alors écheveaux. La Tête de vieillard barbu est significative de ce mouvement de déperdition qui annonce la conquête par les figures de la totalité de l’espace qui les entoure. Le visage est d’un bloc unique, mais les poils s’effilochent et tombent en mèches éparses se laissant pénétrer par tout ce qui le cerne. La Circoncision, dont elle est un détail préparatoire, se construit autour de l’aspect rigide et ferme de cette face, mais le reste de la composition s’assouplie violement comme si elle était éblouie d’une lumière vive et sinueuse.

Ailleurs, dans la Sainte famille avec le petit Saint Jean ; la Sainte Cécile marchant en tenant une basse de viole, précédée par un ange ou encore Le Christ soutenu par Joseph d’Arimathie, entouré par les anges et pleuré par la vierge, tout s’envole et plus rien ne retient le dessin à la feuille de papier. Les figures ne sont plus que le tracé fiévreux d’une nuée d’hirondelles effarouchées. Telle la fumée prise dans le vent, les feuilles mortes emportées par le désordre, la vie religieuse se disperse pour faire corps avec son environnement dans un désir de communion totale et, parfois aussi, hallucinée.