Dans l’espace quasi nu de l’Appartement, huit dessins colorés à grands traits par Guy Yanai illustrent les souvenirs d’un été encore tout proche. Les imposants cadres qui les protègent n’ont pas encore vu leur rose pastel se faner. À l’intérieur flottent les sujets de ces moments passés ; parmi eux, un perroquet et les poissons rouges de Matisse, un bateau, des voiles et des baigneurs, des amis, la mer. Ensemble, ils brossent l’air iodé de ces vacances encore vivaces dont on a le sentiment de tout connaître, sans nécessairement les avoir vécues un jour. Ce sont des images, mais avant tout la légèreté de ces images. Pareilles au bruissement des pages d’un roman pris dans le vent sur un coin de plage, nulle nécessité de s’y arrêter pour en reconnaître le narrateur. Le rythme des mots, comme le rythme des crayons de couleur de l’artiste, nous entraine bien au-delà du sens qu’ils prennent. Il y a quelque chose de très primaire, presque sociale dans ce roulement qui résonne si bien en nous.

Les cyanotypes de Kaye Donachie recueillent eux aussi l’été qui s’est déposé. Près d’une île, la main d’une jeune femme caresse l’horizon plongé dans un bain bleu où, lentement, il sombre parmi les vagues. Bercé par ces dernières nos gestes ont fini par graver en nous la sensation du sable, des frissons et des œillades.

De l’autre côté de la rêverie, un canevas en point de croix – scène de chasse à courre – nous sépare de ces vacances qui, bien qu’appartenant à un autre, nous plaisaient tant. Les jeunes femmes s’en sont allées et c’est un unique portrait qui nous observe : Agatha. Devenue vieille dame, sise dans un salon élégamment logé et chaudement entouré de souvenirs, elle nous observe au travers des années, peut-être des décennies. Douces et belles, les couleurs passées de ses traits accusent le temps qui s’est éloigné, elle est telle qu’elle fut toujours au temps des étés ; sienne, celle des autres, et puis la nôtres à présent.