Six heures durant, et bien avant que tombe la nuit, aura duré Outrage. Le déballage s’est fait dans le plus grand des calmes. Comme à l’accoutumée, une fois toutes choses disposées à sa place, les courants d’air ont commencé à faire flotter les œuvres. C’était un vent de menthe à l’eau, de ceux qui ne désaltèrent pas tout à fait, mais qui attisent au sucre l’envie de fraicheur.

La chaleur n’était pas aussi intense qu’elle aurait pu l’être. L’ombre du parc, parfaite pour abriter les soupirs échappés parmi les graminées jaunies qui ont remplacé depuis longtemps l’herbe verte, mêlait au désir une odeur d’été chargée de soulagements. Il y avait une certaine indécence dans toute cette simplicité. Une charge longuement appuyée et totalement vidée ; par pure jouissance. C’est que l’histoire, achevée, outrageusement achevée, dévoilait pour la première fois le corps nu après l’étreinte. Souple et sec, agile, il s’était roulé le long des murs, déposant la sueur de son dos et de son torse sur la peinture blanche.

L’indiscrétion des traces, leur totale élégance – baroque –, répandue jusque sur le palier, invitait à venir s’asseoir, à feuilleter du regard et du bout des doigts les objets imagés d’une histoire assoupie après l’amour comme pour la dernière fois. Sur la banquette de patchwork, au plus près de certains échos, il fut possible pendant ces six heures d’entendre les derniers souffles. Ils parvenaient par vagues romantiques aux commissures des lèvres et s’ébruitaient par la fenêtre rejoindre le parc où les invités les mangeaient comme s’il s’agissait de friandises. Il faut dire que cette caresse n’avait plus la poigne et l’odeur acre des précédentes, la vigueur avait laissé place au délassement. Rien ne le retenait plus à présent ; une photo au fond du téléphone tout au plus.

Là, au travers de cet égoïsme qui n’en était plus un, presque au sommet de la colline, sur son versant le plus calme et le plus aéré, il devint envisageable de se laisser partir.