Comme si l’on foulait la mosaïque d’un café parisien, tessons rouges, tessons crème et tessons ocre répondent aux jaunes et aux orangés ; plus loin ce sont les noirs mêlés aux verts qui forment un kaki de salle de bains. Le sol entier de la galerie Hussenot en est couvert. Des confettis, une myriade de confettis ordonnés par Antoine Aguilar, et que déplace à peine le pas nonchalant des visiteurs y évoluant comme sur la piste de danse d’une fin de réveillon. Rendue à son point d’épuisement, la fête s’est apaisée, n’en reste que le Color Field.

Aux murs ont été accrochés trois tableaux peints dans une matière épaisse et pointilliste. Le premier représente des montagnes russes enrobées dans un crépuscule majestueux ; le second, l’explosion, sous un ciel limpide, d’un groupe de bâtiments blancs observée depuis un point en hauteur à quelques kilomètre de là, peut-être une colline, en tout cas suffisamment éloignée pour que le danger soit hors de porté ; le troisième semble offrir la vision d’une conduite nocturne aveuglée par des phares de voiture auxquels se mêlent des tâches de couleurs rendues ondulante par les effets de réflexion provoqués à la surface du pare-brise. Ils portent respectivement les titres The Day after, Fukushima et Incerta Alba ; ces titres résonnent comme une prise de conscience fautive. Fautive parce que tardive de presque rien. Or cela semble ne plus pouvoir avoir d’incidences. Les cotillons au sol rappellent que tout s’est arrêté.

Il est même offert aux visiteurs d’observer la scène de surplomb. L’ordre établi par l’artiste dans ses confettis y apparaît plus clairement. Les associations de couleurs se précisant avec le recul. De même, les sujets des tableaux tendent à disparaître dans la ponctuation colorée dont ils sont constitués. Au travers de la couleur la lumière se substitue aux images et aux histoires dont elles sont le terreau.

La mezzanine de la galerie présente également de petits dessins indistincts. Ils sont formés d’un crépitement de points microscopiques formant un voile magnétique semblable à celui que crée la neige dans les paysages de lande. Dans ce silence, les formes, à toutes choses sont devenues les ombres.