Destin familial ? Giorgio Silvestrini produit une peinture italienne ; l’Italie des coins de fraîcheur ponctués de porte-manteaux surchargés hiver comme été, celle des intérieurs au vide métaphysique, digne et drolatique, des grandes masures où cohabitent plusieurs générations, et où les visiteur d’un jour trouvent toujours un fauteuil disponible du moment qu’ils comprennent que celui-ci est exclusivement réservé aux membres de la fratrie.

Il s’agit donc d’une peinture riche, prodigue, comme le sont les personnes qui connaissent le prix des choses, parcimonieuse et à la fois pleine de surprises dans ses accords de tonalités proches de ceux du costume d’arlequin. C’est l’histoire d’un rire-aux-larmes où règne l’équilibre classique des goulots d’étranglement.

L’exposition des travaux de Giorgio Silvestrini à la Galerie Eva Hober a quelque chose d’un inventaire sentimental, chaque sujet semble être extrait d’une lettre amoureuse. L’humeur y est badine, assurée bien que mâtinée d’hypochondrie. Il y a là un arbre à chat raccommodé, des décorations d’anniversaire réutilisées plusieurs fois puis oubliées sur place et devenues permanentes posés sur de grand aplats qui trahissent l’application avec laquelle les sols et chaque surface sont régulièrement briqués. La diversité des linges présents dans les tableaux en attestent. Ici des torchons, là des chiffons pour astiquer les meubles, de vieux chiffons, des gris, des beiges, des blancs, tous plus ou moins imbibés de cire et de jus de citron ; on trouve aussi d’antiques pièces de créateurs, usées mais impeccablement entretenues ; une balle de tennis – sport que l’on pratiquait assidument avant que le cours ne fut abandonné faute d’avoir pu être entretenu ; une couette séchant sur un fil à linge, le nécessaire pour la battre, et finalement beaucoup plus de pièces de tissus que l’on aurait pu se l’imaginer.

C’est que dans ces familles-là, on ne rigole pas avec la qualité des étoffes.