Au loin depuis l’entrée de la Galerie Patricia Dorfmann, un grand écran vertical diffuse une vidéo. On y voit un homme, vêtu d’une perruque le couvrant de la tête aux pieds, debout dans le creux d’une faille rocheuse. Un bâton à la main, aveuglé par les serpentins nacrés qui virevoltent et annulent sa silhouette, l’homme danse.

Cette danse chamanique que rythment des gestes amples et répétitifs a été réalisée par Henrik Plenge Jakobsen. Elle a pour titre Ubuact et tourne en boucle avec acharnement, comme si continuellement inefficace elle devait être relancée, condamnée à offrir une réponse qu’elle ne peut parvenir à déclencher auprès des divinités qu’elle sollicite. C’est peut-être à cause de ces échecs, ou, tout du moins à cause de cette absence de résultats visibles que l’artiste présente dans l’exposition d’autres costumes de danse.

Ces pompons de majorette géants, véritables fournaises de polyester pour ceux qui les enfilent, présentent plusieurs profils différents ; Blondie, à la longue chevelure couvrant jusqu’aux chevilles telle une Marie Madeleine pénitente, intégralement cachée derrière les mèches décolorées par le soleil, côtoie une folle emplumée de rose, de parme et de gris perle, Juno Reflector, couverte de serpentins argentés, ou encore Deep Skin, une haute ourse à fourrure blanche et noire molletonnée comme une peluche de fête foraine. Ubuah and Ubuah Juvenile témoignent quant à eux de la dimension familiale des rituels qu’incarnent ces tenues. Ces deux silhouettes, l’une de taille adulte, l’autre enfantine, sont ornées de serpentins en plastique coloré proche de celui des sacs jetables, jaune sale, vert et rouge passé qui sont offerts en fin de caisse dans les hyper-marchés.

Tout autour sont accrochés aux murs des panneaux lunaires, grands parements noirs, bleutés comme la nuit pour laquelle ils sont conçus. Rien ne se reflète à leur surface, rien ne s’y réfléchie, tout ce qui parvient à y pénétrer y est piégé, chimiquement transformé en courant électrique sans que personne n’ait eu à danser, ni même à y croire.