Autour de Jean, Thomas, Jacques le mineur, Thaddée, Matthieu et le Christ – les six protagonistes de l’apostolado aux cartels de Ribera que réunit le musée des Beaux-arts de Rennes – une dizaine de scènes religieuses constitue l’exposition dossier consacrée à l’artiste.

Parmi elles, un Saints Pierre et Paul ; deux apôtres débattent autour d’un texte, Pierre, le plus vieux des deux examine l’ouvrage tracé dans la blancheur du papier, Paul, lui, fixe l’observateur du regard. Sa main droite brandit haut la garde de son épée, tandis que de l’autre il maintient le rouleau déplié accoudé à plusieurs volumes dont les tranches brunies accusent le temps passé à les compulser. L’un et l’autre ont le visage parcouru de rides, la peau filant dans une épaisse coulée picturale dont les sillons sont si marqués qu’il est possible de les suivre, se prendre dans leurs courants et de glisser avec eux d’un coloris à un autre le long des crêtes et arrêtes. Le passage qui retient l’attention des deux hommes porte une inscription dont le va et vient entre les apôtres raconte l’intérêt et la complexité de l’interprétation. Pourtant, si l’échange intellectuel s’impose en tant que véritable sujet du tableau, probablement commande faite au peintre, celui-ci en a précieusement conservé le centre de gravité. Dans l’ombre du pli de papier qui relie Paul à Pierre, pris dans la vie de la lourde tunique, apparaît renversée une figure enfantine, un spectre pâle aux orbites larges à moitié cachées par les couches plus épaisses du revers de manche ocre d’un des saints. Le fantôme, réminiscence inattendue d’une composition plus ancienne, ne subsiste que par ce visage poupon à l’air triste. Une fois vu de lui, la surprise est si poignante que l’observateur ne parvient plus à s’en détacher. Tous les livres, tous les textes, rien n’y change. Ni la conscience du moment sacré qui lie les deux hommes, ni la beauté de la peinture.