Outre leurs œuvres, les propositions de Lena Amuat & Zoë Meyer à la Galerie Marine Veilleux incluent des étagères, la couleur du mur qui les porte prolongée par leurs ombres portées au sol. L’hexagone de ces dispositifs crée une sorte de barrière naturelle, une haie, pareille à celles qui autrefois bordaient les vergers d’Ille-et-Vilaine où l’on faisait paitre des moutons à l’hiver afin qu’ils laissent place propre derrière eux et que puissent zébrer l’espace mental de ces quelques ares les branches nues des pommiers taillés bas.

Dessins et photos y sont déposés comme le seraient les divers objets qu’ils représentent. On y trouve, le tirage magenta d’une tour de Babel composée de cartons empilés, une collection de toupies ou de coquetiers, une sculpture en fil de fer, des polygones, l’un régulier, l’autre pas, une main, des atomes, un visage sculpté, et un sablier.

Toutes ces formes ont en commun avec les pommiers d’être si répandues et si courantes dans l’imaginaire qu’elles s’en trouvent protégées par les trop nombreuses tentatives d’en percer les mystères. Elles n’attirent pas la curiosité. Leur raison d’être est à chercher dans leur invariance, leur présence sans drame qu’entretiennent annuellement les ovidés, broyant les feuilles mortes et les parasites qui s’y reproduisent.

Le mystère se trouve plus au fond de la galerie. Dans la dernière cave ouverte au publique est projetée la vidéo d’une sphère noire d’où émane par vagues et plis successifs une lumière d’Éclipse solaire bleutée. Passé le rideau, derrière les astres et leur figuration, la même scène se rejoue sur le mur au travers du tissu. L’ondulation y est plus marquée. La sensation enveloppe tout l’espace par son dédoublement se refermant sur elle-même, et anéantissant l’horizon stratosphérique qui caractérisait le rapport à la première image. Désormais à l’abri d’une moustiquaire, moite et cachée sous la lune écrasante qui s’est abattue sur nos rêves, la nuit a pris la forme d’une malle de voyage ne laissant filtrer qu’une ligne blanche et circulaire se balançant au bruit mécanique d’Hundi, l’horloge chien-chien dont la queue et la langue font contrepoids.