Étranges Découvertes que ces choix scandés en thématiques comme si elles constituaient le menu d’une déclaration d’intention. Cinq étapes se succèdent. La première est communiquée par la joie sauvage, gorgée d’histoires à raconter, que propose l’Afrique. Deux regards se complètent, l’un porté de l’extérieur, celui de Patrick Willocq dont le travail est littéralement marabouté par l’exotisme et l’anthropologie, et un autre venu de l’intérieur, narrant la fête crue de l’occident africain présenté par Kudzanai Chiurai.

La seconde étape est celle de l’Amérique. Son déclin, celui de l’industrie de la presse de Philadelphie que narre Will Steacy, humble comme le Hall of Fame d’un commissariat de banlieue où s’entassent dans de petits cadres noirs les vieilles gloires locales que l’on tente de ne pas oublier. Le travail de Pieter Ten Hoopen est lui enfoncé dans le Montana et sa désindustrialisation, ses accros aux armes et aux drogues ; là, la vie disparaît, elle en a presque finie. Le rêve américain n’existe plus que sous la forme de bibelots. Même la forêt semble ne pas pouvoir s’en remettre. Les animaux hurlent, les hommes se taisent, les chevaux paissent.

Le contraste est fort avec l’Asie de Kechun Zhang. Ce sont des images claires, laiteuses, de paysages en apparition. Les édifices proto-industriels encore minoritaires à l’horizon ponctuent ses compositions, mais l’on sent bien que sous peu leur gloire explosera et qu’alors ils rempliront tout l’espace. L’Asie de Youngsoo Han est l’éternelle du xxe siècle, pittoresque dans son occidentalisation ; petits formats aux noirs et blancs intenses où les hommes et les femmes semblent être de microscopiques figurines tantôt marchant déterminées, tantôt hagards, à l’arrêt.

Les deux salles suivantes sont consacrées à l’abstraction du réel. Dans la première Victor Robledo montre des photographies architectures closes, peuplées d’angles, de plafonds, de miroirs et de reflets qui ne faussent pas la lecture, mais démultiplient la complexité des structures fixes, permettant d’y voir déambuler la lumière. Miguel Mitlag s’intéresse au volume des couleurs. Dans ses photographies elles deviennent presque des objets, préhensibles et tactiles.

Le parcours s’achève sur le travail d’archivage et de comptabilité que réalisent Katharina Gaenssler et Ilit Azoulay. Toutes deux se servent de la photographie comme d’une corne d’abondance inversée. Elles y empilent et accumulent les souvenirs, les gestes et les images.