Le parcours des Rencontres Photographiques d’Arles s’ouvre sur la voix de Lucien Clergue. Elle précède et accompagne un accrochage chronologique de son travail. Diffusée par de petits haut-parleurs disposés tout au long de l’exposition, elle raconte les photographies avec une bonhommie qui contraste avec l’étrange théâtralité de l’ensemble.

Les premières images sont construites sur les ruines d’Arles brûlées par le soleil de 1955. Les façades criblées d’impacts sculptent des ombres aux noirs envoutant que seule habite la poussière et ses halos.

Suit l’enfance, l’arlequin qui regarde droit dans ses bottes, bras croisés, dos au mur, l’objectif pour lequel il a endossé son costume de losanges. Il appartient à La Grande récréation, la suite de saltimbanques dramatiques et enfantins qui a pris possession des ruines. Le garçonnet pose gravement face à l’objectif ; il ne sourit pas, sans que l’on puisse réellement déterminer s’il ne sait pas ou si on lui a demandé de ne pas savoir. D’ailleurs ce qui s’est passé autour de lui importe guère, les gravas semblent presque faire partie d’un décor de cinéma.

Viennent les Gitans et avec eux apparaissent le bruit et la musique.

Dans les premières années de son activité le photographe construit son iconographie de manière concentrique. Comme s’il était au centre d’une arène. Entouré par le sud, par Cocteau, Picasso, les corps nus dans les vagues, les animaux morts sur la plage, les formes brutales et abstraites d’un paysage à même le sol qu’il collecte avec la délicatesse gorgée d’iode d’un chasseur d’oursins.

Les années 70 ne sont pas encore arrivées.