L’art dans les chapelles se parcourt en voiture. Par de petites routes cachées qui sillonnent la campagne, dense et vallonneuse, du centre de la Bretagne. Elles relient une vingtaine de chapelles de granit où sont installées pour l’été autant d’œuvres contemporaines. Chaque étape est l’occasion de découvrir un creux humide. Même quand l’édifice se trouve en hauteur on y pénètre par un pas en dessous. De même que dans un lavoir, accolés et ruisselants, pierre et eau font corps. Les fluides et les solides y sont vivants d’un sang que renouvellent les œuvres de passage et la cohorte des croyants venus en bus pour le vernissage, comme d’autres fois viennent les pèlerins le jour du Pardon.

Point de Saint-Sacrement, mais des charpentes sous des toits que l’on doit régulièrement rénover. Ils sont le signe du vieillissement de l’empreinte du passage des hommes.

C’est d’ailleurs contre la pierre de la Chapelle Saint-Nicolas à Saint-Nicolas-des-Eaux que Matthieu Husser a installé son imposant logo Facebook. Bâtis en trompe-l’œil, cette œuvre dont l’artiste, contraint à ne pas intervenir dans la chapelle dont on rénove les enduits intérieurs, à essaye de fondre dans les murs ne fait que souligner l’incompressible proximité entre la chapelle et le sol dont elle fait partie. Mais elle ne trompe les personnes qui ne fréquentent pas les linteaux de pierres. Le plâtre et la structure de bois qui le constituent n’ont pas vocation à perdurer. Pas plus que ne l’on les dimensions sociales des réseaux, qu’ils soient religieux ou numérique.

À Castennec, Anne Rochette investit la Chapelle de la Trinité. Elle y dispose plusieurs sculptures dont Three depictions, un ensemble de trois céramiques aux formes organiques, presque explicitement génitales. Lisses et brutes, seulement glacées de cramoisi sur les orifices pratiqués par l’artiste au sommet de chacune d’elles, elles sont posées sur des poufs recouverts d’un motif d’Arlequin quadrillé qu’elles écrasent. Face à leur alignement Le tombeau du géographe à la forme d’un autel. Parallélépipède à la forme éternelle – las – il donne l’impression d’être en train de fondre, telle une motte de beurre, vainement disposée à nourrir les interstices entre les pierres.