Hommage moderniste, les sculptures en bois dressées par Cameron Platter à la Galerie Hussenot induisent un rapport physique immédiat. Leur taille brutale, membres déraisonnables, recouverts d’une patine noire travaillée comme du cuir, est contrebalancée par les socles en bois de construction qui les portent à hauteur de visage. Mstim, Clown, Aneros, Vibe, Cavalier et Bubbles pourraient être des nains de jardin en habit du soir, mais à bien les observer, ils font plutôt songer – idée que l’on préfère dans un premier temps laisser de côté – à d’extravagants jouets sexuels.

Juste derrière eux un grand tabernacle, noir lui aussi, est surmonté de l’inscription « Pussydick ». Ouvert, son corps est rempli de canettes d’une boisson énergisante offertes ostentatoirement au visiteur ; au-dessus du frontispice deux grands yeux écarquillés l’observe : ira, ira pas. Ce Monster publicitaire achève d’enlaidir la charge sexuelle déjà fort poisseuse dans laquelle baignent les autres sculptures. Car il ne s’agit pas de pornographie ni d’érotisme potache et estudiantin, mais plutôt d’une digression grand public de leurs expressions. Il en ressort une dimension presque culturelle, une évidente communauté faite de références devenues banales alors qu’il y a peu elles se dévoraient mi-honteux mi-avide dans la solitude des fantasmes. Tout cela est ici partagé, exposé, ordinaire, arraché au domaine de l’intime inavoué pour se dévoiler sans aucun risque, se révélant finalement tout ce qu’il a de plus quelconque comme fond de pensée.

Ce qui est devenu banal devient laid.

Sur la mezzanine, un ensemble de dessins émet malgré tout un doute dans la débandade qu’orchestre l’artiste. Ces dessins à la sexualité frénétique, explicites sans être évidents, jouent sur l’illusion du contact : le gras, le gros, le mou et le dur donnent à River 1, 2, 3, 4, 5, 6 etc. le tonic d’un matelas à ressort neuf.