Exposition de mots, Langue des oiseaux et coq à l’âne se noie dans l’ambition d’exposer l’humour. Aridité linguistique, usure du regard, petites lignes, scénographie de CDI et private-jokes à tout va en sont les principales causes.

Et pourtant, Raymond Hains y apparaît comme un génial inventeur. Précurseur et pas oiseux pour un sou. D’ailleurs, qui se soucie de déchiffrer ses affiches lacérées ? L’enchevêtrement des mots vaut pour le hasard des rencontres que l’on peut y faire et certainement pas pour la cristallisation de ce qu’y lurent – probablement plus érudits et trop contents de s’ériger en descripteurs –, les commissaires d’exposition et autres spécialistes. Plus encore, il y a dans ces travaux une sensibilité plastique. Et dont le goût de la palissade lettrée est certainement l’une de ses plus joyeuses formes d’expression. La foire aux skis et Palissade rossignolesque, hommage aux petits chanteurs à la croix de bois, serrés en fagot, le cou étiré en hauteur et bardés d’insignes dans leur habit de parade, tiennent le mur avec ardeur.

Le mur, oui le mur. Car si l’artiste aime les jeux de mots, c’est qu’il s’en sert pour donner de la souplesse à leur support : presque systématiquement plan. Et de même que chacun rebondit différemment selon son élan sur la trame d’un trampoline, chaque observateur opérera une combinaison différente dans la trame de références que met en place Raymond Hains. Les mots et les lettres ont cela de particulier qu’ils sont connus de tous mais sont appropriés individuellement. Tout le bonheur de ce travail est la subtile association de ces signes avec des références à la fois de l’ordre du signe, mais aussi de l’objet – en l’occurrence le plan utilisé. C’est celui-ci qui est au cœur de l’œuvre et que l’artiste parvient avec tant de brio à renouveler. Les signes, eux, sont toujours les mêmes ; ce sont les références, et tout particulièrement les références visuelles et plastiques qui fluctuent.

La série Macintoshage réalisée à partir de fenêtres d’écran superposées est un choc. Bien plus par son support que par son contenu. Ce dernier est de l’ordre de l’index, de l’archive, mais les fenêtres au graphisme désormais désuet du système d’exploitation utilisé par l’artiste grincent sous l’œil. Avec le temps, les fibres de caoutchouc qui donnaient leur souplesse à la trame du trampoline ont durci. On n’y rebondit plus et, étonnamment, on finit par se trouver au diapason de nos voisins.