Un long couloir, parfaitement nu et blanc, emmène sur une dizaine de mètres les visiteurs vers la réplique de la salle précédente – volume différent, mais revêtements muraux identiques : un vert d’eau où flottent des nuages noirs d’un mat simplement bombés par-dessus la couleur.

Il n’y a rien à faire d’autre que de se balancer entre ces deux espaces via l’invitation à l’oscillation que représente le couloir.

La peinture, elle, n’est permise qu’une fois l’agacement évacué. On la trouve dans la rugosité des murs, en s’approchant de cette maigre sensation qui sable nos mains lorsque l’on les pose dessus. Le contact est uniforme, d’une lente lassitude. Puis vient la limite avec le blanc, qui lui est lisse comme de l’enduit très finement poncé. Il est si frais que l’on risque d’y laisser des marques d’ongles, mais le fil de peinture tendu entre les deux surfaces est le seul sursaut tangible de l’expérience qui est donnée. Et pourtant il n’est rien, ni geste, ni couleur, simplement deux bords accolés et symétriques que l’on retrouve à chaque extrémité du couloir. Ailleurs ne reste que l’étendue infinie de la peinture ayant tout recouvert.

Pour l’aborder il faut fermer les yeux, parcourir les surfaces, en avoir plein les mains, courir ; il n’y a rien d’autre ici pour arrêter le visiteur que l’obstacle de sa propre imagination. Imaginer que la peinture est là. Qu’on y pénètre comme l’on pénètre dans un tableau par un tout petit détail de couleur – un petit pan de mur jaune, perdu dans la construction savante de l’image, mais qui la fait disparaître en totalité par son magnétisme.

Une fois dedans, la surface n’ayant plus de bord, la couleur n’a plus de fond.