Nature morte aux bouteilles, ornements de cheminée, coquillage (32 x 41,3 cm) a été mise en vente le 27 novembre, à l’Hôtel Drouot, par l’étude Millon.

Face aux observateurs venus l’admirer, cette petite huile brillante et bombée comme un cul de bouteille peinte entre 1884 et 1885, qu’un ancien propriétaire a logée dans un cadre doré doublé d’une marie-louise tissée, affiche le port altier de la noblesse de campagne. Rustique, profondément grasse, avec tout le vernis requis pour faire miroiter les tonalités franches de terres et d’ocre mêlées d’émeraude et de vert de vessie, elle possède une surface riche comme la croûte d’un pâté de chevreuil.

Sa composition est occupée au premier plan par un coquillage – monnaie de pacotille, ronde et luisante, pour amateurs d’exotisme africain – derrière lui, deux flacons se tiennent serrés, droits et soigneusement refermés. Ils sont accompagnés d’une poire à fusil, d’une lampe dont le pied, tout en arabesque, est peint sans aucune aisance, et d’un tas d’objets rassemblés sur un dessus de cheminée amoureusement tartiné de reflets brun, châtain et verts, ceux-là même qui donnent à ce tableau un si merveilleux fumet de terrine. La foule de petites choses à droite de la composition n’est pas vraiment identifiable. Remplissant sa toile, l’artiste a voulu construire l’image d’un moment d’étude, un lieu fourni, où l’assemblage des formes et de leur symbolique accumulée prend le pas sur l’érudition qui pourrait en découler. Qu’importe en effet que ces trésors en soient pour les autres, leurs liens sont d’émotions, uniques et personnels. Un peu comme quand, à la sortie de l’enfance, presque adolescent, on étale sur sa table de bureau les trésors accumulés en une courte de vie de désirs et d’envies pour les observer encore une fois avant de les oublier pour des intérêts plus extravertis, les filles, le sport etc. Ainsi rassemblés on en oublie le sens, et pourtant, ils continuent à avoir une présence, un poids, une irrésolution intime logée au fond de soi – ici sur la cheminée. C’est que Van Gogh quittera bientôt Nuenen pour Anvers, puis ce sera Paris.