L’exposition de Peter Halley à la Galerie Xippas se pose comme une énigme mathématique, un casse-tête pour les génies de l’évidence, les cracks de la théorie des ensembles. A priori, les peintures que présentées n’ont rien de sensationnel en terme de complexité, elles ont plutôt l’air de tranches napolitaines pleines de colorants artificiels. Et pourtant, leur variation conduit inexorablement à supposer que derrière l’équation relativement élégante qu’elles contiennent se noue plus que ce que leur lecture permet de discerner. Peter Halley ne s’en cache pas, il aime les systèmes informatiques, les flux de communication et tout ce qui permet aujourd’hui d’ordonner le bazar que l’on croit voir en regardant par la fenêtre.

Aucun indice n’est donné, mais l’on peut jouer à essayer de deviner. Ainsi, cinq tableaux carrés, de dimensions identiques, ont été alignés. Chacun d’entre eux figure une vision simplifiée d’un réseau. Dans chaque tableau, deux ensembles distincts (trois pour l’un d’entre eux) représentés par des blocs de couleurs fluorescentes sur des fonds noirs sont reliés par des voies de circulation prenant origine dans la base horizontale qui, systématiquement, soutient la composition. Rien de plus, or si l’on y prend garde, on s’aperçoit qu’à chaque fois cette base est peinte séparément, sur une toile étroite et horizontale simplement accolée à l’autre, elle ne fait pas partie à proprement parler du tableau, elle n’est que le soubassement, la prédelle. Cette subtilité induit une modification de la compréhension du tout. On s’imagine très bien qu’un rapport du même type que celles liant les éléments d’un retable.

La situation est pourtant sensiblement différente. Les bases à chaque fois identiques – trois bandes, deux couleurs alternées –, indiquent que ces parties sont des socles communs et non pas des éléments périphériques. Alors que les parties supérieures, bien que plus importantes, plus visibles et plus complexes, sont interchangeables. Elles sont accolées, tels des appendices, des excroissances branchées, supplémentaires, formulant une circulation légèrement différente. Un peu comme si elle n’était qu’une ligne de code ajoutée à un programme autonome. De là faire l’hypothèse que ces peintures sont des signes d’une théorie du complot il n’y a qu’un pas. Un pas que face à cette géométrie fluo-nerd on est bien tenté de franchir.