L’exposition organisée au FWM est une mise au point. Un bilan ni exhaustif ni rétrospectif, mais interrogatif quant aux spécificités du médium vidéo dans le champ de l’art contemporain. Cette tentative de dégager les questions et les réponses que les pratiques de ce médium ont permis aux cours de ces quarante dernières années s’inscrit dans le parcours labyrinthique du musée – trois niveaux non contigus et un espace accessible qu’en ressortant du musée accompagné d’un gardien muni des clés idoines. Tout naturellement, il en va du contenu comme du contenant : rien n’est simple.

Au troisième étage, Letter on the Blind, For the Use of Those Who See, la vidéo en noir et blanc de Javier Téllez, s’ouvre sur un groupe d’aveugles marchant à la queue leu-leu pour parvenir devant l’entrée d’un zoo d’où sort un éléphant. L’animal s’approche du groupe guidé par son dompteur. Les six aveugles sont assis en ligne et, un par un, vont caresser l’éléphant. Au fur et à mesure, ils racontent leurs expériences, s’y croisent des considérations tactiles et olfactives, la découverte de la peau rugueuse, surface neuve et pourtant pleine de comparaisons, dégoutante, étonnante, et parfois attendrissante. À ces descriptions est associé un récit relatif à leur expérience de la cécité. Tous ces éléments ont en suite été utilisés pour constituer une sculpture faite de briques, de pneus et de vêtement et qui imite la forme d’un pachyderme. Celle-ci est disposée dans la salle, mais ici, nul n’est autorisé à la toucher Beulah.

L’œuvre de Pepòn Osorio, Drowned in a glass of water occupe elle aussi tout un étage. Elle consiste en une grosse installation montée sur une scène circulaire (censée tourner sur elle même) que l’artiste a séparé en deux hémicycles. L’un est chargé de tonnes d’objets accumulés comme l’on encombre une chambre de souvenirs oubliés, papiers, bibelots, camelotes et factures s’amoncellent sur les meubles devenus inutiles, puisque obstrués. Au sol on trouve des costumes, des voitures de police miniatures, un fauteuil roulant, des céramiques et une télévision allumée. L’autre partie est occupée par une fontaine, un arbre et un brancard d’ambulancier où clignotent d’autres écrans, d’autres vies.

Plus loin encore, une vidéo de Theresea Hak Kyung Cha Permutations projette très simplement trois images d’elle, l’une de face les yeux ouverts, une autre les yeux fermés et une troisième de dos, ce à quoi sont associées des images blanches et d’autres noires. Minimalisme absolu mais amusamment perturbé par un morceau disco entêtant et bien connu provenant d’une salle voisine. L’impassible visage se trouve ainsi rythmé bien contre son grès.

L’interaction entre ces deux œuvres donne peut-être l’une des réponses au questionnement initial, avec l’avènement de la vidéo la contamination de l’espace de réception devient un élément clé dans l’appréhension des œuvres.