La galerie Marian Goodman présente quatre Wall drawing de la série Asymmetrical pyramid with color ink washes superimposed. Ils répondent aux numéros : 459 – 457 – 770 et 443. Rien de plus clinique en somme. Rien, jusqu’au moment où l’on décide de faire le déplacement et d’aller les observer de ses propres yeux.

Spontanément, on se plaît à compter les angles, repérer ceux qui sont droits, jauger la qualité du travail des assistants, on souligne du regard la justesse millimétrée de la performance. À première vue, les dessins sont pareils à ce que l’on avait imaginé d’eux. Puis l’on compare les couleurs. On s’approche de leur matière toujours si caractéristique des lieux qui les accueillent. Ici les murs ont un grain serré, un grain qui accuse de nombreuses couches de peintures superposées dont les dessins ont pris l’épaisseur. Sur cette surface les couleurs deviennent épaisses et denses comme du calcaire. Il s’agit de moins d’un millimètre, mais cet intense et quasi imperceptible vallon donne une peau d’orange aux œuvres ici appliquées. Cette dimension fait naître l’impression qu’elles ont été sculptées comme des bas-reliefs, un très maigre bas-relief, mais qui dans son infini diversité sublime l’épure des dessins. Du coup, on en vient à se dire qu’ils pourraient être tranchés, découpés, que l’on pourrait en avoir physiquement un morceau chez soi – déposés comme des mosaïques, ces images qui n’appartiennent qu’à l’espace parisien de la galerie Marian Goodman deviennent alors une sculpture pour ceux qui collent leurs yeux à elles.

Le sous-sol de l’exposition est occupé par un mur de sérigraphies et de dessins qui fait le point sur les formes et les signes qu’affectionnait l’artiste. Tous sont bien mats, bien nets et bien droits. Même les cercles et les courbes ont l’air d’être droits. Seule la composition de ces feuilles aux formats variés laisse supposer, qu’à l’inverse des œuvres réalisées au rez-de-chaussée, une autre main que celle de Sol Lewitt soit intervenue. L’ordonnancement prend alors un tout autre sens, les œuvres ne font plus totalité, elles nous laissent nous approcher et les apprécier comme il est usage face à une œuvre d’art. De là, il est possible de les soupeser, on se rend compte du jaunissement de certaines papiers, on compare les simplifications, on joue au connaisseur. Mais une fois remonté à l’étage, se dirigeant vers la sortie, on retraverse les Wall Drawing et, à nouveau, on se sent enveloppé dans leur singulière peau colorée. À nouveau on se retrouve seul face à l’artiste.