Hotel by railroad, la peinture est fine, sèche par endroits, douce et suave ailleurs, le léger et le lourd se coudoient, accolés comme dans un jeu de Puissance 4 – nous sommes à mille lieux de la peinture uniforme que l’on s’imagine en regardant les reproductions de l’artiste. Les deux personnages qui occupent le tableau, l’un debout, l’autre assis ne se regardent pas. Lui fume à la fenêtre, elle tente de s’occuper avec un livre. Au milieu, un miroir les sépare et sur celui-ci des formes géométriques composent des diagonales faisant apparaître un losange bleu coupé et deux gris verdâtre. Outre les banalités de cette chambre d’hôtel, c’est l’extérieur qui attire – que font ces deux vieux, pourquoi ne sont-il pas dehors alors que le ciel est si bleu ? D’ailleurs, quelle heure est-il, où est le soleil ? De l’intérieur, on jure que l’Amérique est grise comme une moquette passée par le temps et, pourtant, il n’y a de gris dans ce tableau que le reflet du miroir qui nous fait face.

Dans People in the sun, ce sont cinq personnes qui sont assises, quatre d’entre elles le sont côte à côte, une se tient derrière et lit. Ceux de devant profitent des rayons du soleil bas de la fin de journée. Les ombres bleues qui s’étirent dans leur dos indiquent la petite fraîcheur qui tombe, d’où le foulard au cou d’une des femmes, d’où l’écharpe à celui de l’homme qui lit, et d’où les vestes fermées sur les poitrines. Au loin, les montagnes pointent avec régularité comme des crânes accumulés dans un coin de crypte. Chacun fait ce qu’il a à faire, et entre tous, la lumière de plus en plus jaune rétrécie les écarts.

Sun in an empty Room, un jeune couple se met en ménage à la tombée de l’été, il finit de visiter un appartement qu’il prendra peut-être. La pièce que l’on découvre est certainement l’une des dernières, puisqu’à l’étage et peu grande, la couleur fanée des murs indique que les visiteurs n’en seront probablement pas les premiers locataires. La pièce est parfaitement vide. À droite, une fenêtre s’ouvre sur un arbre qui la bouche, laissant cependant la lumière passer et offrir une douce intimité à ce futur cocon. Sur les murs, la lumière qui filtre au travers de l’encadrement de la fenêtre trace des rectangles un peu plus jaunes que la tapisserie, deux rectangles jumeaux, l’un plus grand que l’autre et se tenant légèrement plus en biais que le second qui, plus petit, nous fait presque face. Au sol, une forme allongée les rejoint, traçant ainsi un petit couloir de lumière aux pieds des visiteurs.