L’exposition du duo néerlandais au musée de la Chasse et de la Nature se présente sous la forme d’un cabinet de curiosités. Sauf qu’ici, outre une accumulation d’animaux naturalisés, ce sont les peintures  et les installations des artistes qui sont mises en scène. Les totems et les reliques que constitue cette débauche de zoologie, ce regard fané, vaguement exotique, que les artistes posent sur le monde et ses extrémités, constituent en fait une anthropologie du dedans. Ce sont leurs propres productions qu’elles prélèvent et exhibent.

Volontairement disparate, l’accrochage fait la part belle aux animaux. Les deux gorilles habituellement en poste au second étage, ainsi qu’un grand ours blanc sont installés en pleine déambulation dans l’espace de l’exposition. Tout autour, d’autres têtes empaillées se mêlent aux œuvres. Tant et si bien que, le regard s’inverse, l’étrangeté que met en avant ce type de présentation semble ici être proposée à l’attention de ces animaux. Leurs regards de verre renvoient les visiteurs à leurs propres attitudes faces à la décadence organisée par Hilarius Hofstede et Berend Hoekstra.

Dans cette atmosphère vieillotte de musée des sciences, les rebus, les objets usés et cassés sont à leur aise. C’est le cas de deux vieilles bouées de sauvetage suspendues, dont l’état laisse deviner qu’elles ne sauveront plus jamais personne. Un peu plus loin, un gyrophare bleu tourne tranquillement, mais sans un bruit, sans sirène, il clignote un état d’alerte dont la persistance tente vainement d’attirer l’attention. Les murs sont recouverts de dessins disposés un peu partout et encadrés d’antiques dorures dépareillés. Leur assemblage tient presque de la collection, du souvenir et de l’anecdote, ils montrent des signes dont on n’a plus le code – mais doit-on réellement en voir ? Ailleurs, des peintures à dominante rose évoquent la chair, l’huile est vivement répandue et trifouillée avec énergie, mais sur de petits formats. On devine de ci et de là qu’elles représentent des animaux ouverts. L’intuition du sujet voudrait qu’on les regarde avec méfiance, et peut-être une pointe de dégout,  mais c’est une chair douçâtre et pastelle que l’on a sous le nez, une chair de satin et de taffetas qui, même contenue dans la silhouette d’un lapin éventré, ne suffit à pas à nous faire détourner le regard. Pour un peu on y mettrait le doigt, à la manière d’un saint Thomas qui se demande si c’est du lard ou du cochon qui lui est tendu.

Dans les autres salles de l’exposition sont présentés d’autres stigmates de l’exotisme scientifico-artistique, les deux artistes ne sont tendres ni avec les tenants de l’un ni avec ceux de l’autre, sans dérision ni exagération, ils exhibent les restes du festin que firent amateurs et amatrices.