C’est devenu une coutume, le temps des chaleurs estivales est celui où les galeries choisissent d’organiser une exposition de groupe. Cette année encore, la galerie Bertrand Grimont propose une prospective par-delà les écuries. Les artistes qui y sont proposés sont tous relativement éloignés les uns des autres, pourtant, leurs travaux parviennent à créer une réjouissante cohérence.

Mois de juillet oblige, on commence la visite par le sous-sol. En bas, Le Rhinocéros – une grande photographie de Thomas Fontaine – ouvre l’exposition. Dans cette image l’artiste compose une narration, une narration biaisée, évidement, mais c’est la règle du jeu. On y voit une femme nue et masquée. Montée sur une estrade, elle ouvre un rideau ; devant elle, une corne de rhinocéros à la substance de cervelle a été substituée à la bougie d’un imposant chandelier d’église. Les éléments de la photographie semblent inviter l’observateur pourtant, la mise en scène, l’estrade, le mur que l’on voit en arrière-plan, indiquent que tout est faux. L’image est en équilibre à la frontière de la séduction facile, mais elle ne franchit pas le pas.

L’espace suivant est uniquement éclairé par une œuvre de Rada Boukova ; elle consiste en un luminaire mural disposé sur une vitre de plexiglas et recouvert d’une peinture écru. Seuls les interstices de la peinture écaillée permettent à la lumière de se diffuser. Entre le mur et la plaque transparente pendouillent – inaccessibles et désuets –  un cordon et son interrupteur. Juste à côté est accrochée une photographie de la même artiste dont la surface est maculée de taches de peinture, brillantes et foncée. L’image, en noir et blanc, montre deux palmiers. Entre lumière tamisée et vacances aux Caraïbes, sur fond de mur en pierres, les deux œuvres se répondent étrangement, comme si l’une et l’autre avaient été les témoins d’un événement dont il ne reste rien si ce n’est des éclaboussures.

De retour au rez-de-chaussée, un autre palmier nous attend, encore une photographie, en couleur cette fois-ci. C’est l’œuvre de Gabriel Jones, et elle pourrait avoir été prise dans n’importe quelle station balnéaire de la côte varoise. Le vide qui caractérise cette série, l’absence d’êtres humains et le gazon brûlé par le soleil sont redoublés par la franchise des couleurs qui envahissent et voilent l’image. Sur celle-ci, seul un tout petit morceau de ciel est visible ; il ne dit presque rien, mais il suffit à ce que l’on s’imagine immédiatement qu’il y fait chaud, trop chaud pour l’ennui qui pèse sur cet été.