En entrant dans la Galerie Les filles du calvaire pour visiter l’exposition d’Emmanuelle Villard, on est rapidement pris par le sentiment de pénétrer dans la boite à bijoux de l’artiste. Ce clin d’œil hyper maquillé et bardé d’une ribambelle de perles en plastiques surprend comme un appel au luxe cheap’s mais efficace de la superficialité.

D’ailleurs, on ne trouve pas d’ironie ici, juste la jouissance de la parure, la boursouflure de la nacre de synthèse, les colliers et les brillants, la verroterie et les babioles baignant dans des couleurs acidulées et pétillantes. Les œuvres sont tour à tour des rivières aurifères et des sables mouvants pour le désir, on s’y enfonce avec délectation en songeant à Balthazar Picsou faisant le saut de l’ange dans son coffre.  Rien ne freine nos digressions matérialistes, on se laisse aller gentiment. Il faut dire qu’il y en a pour tous les goûts, l’exubérance se pique même d’un peu de sobriété le temps d’un tableau en variation de beige, blanc et gris.

Jusqu’au moment où, trois pas en arrière, notre regard engage une association désagréable. Il ne s’agit pas de culpabilité, non, la soupe du discours sur la société de consommation ne vaut rien. C’est plutôt que lorsqu’elles ne sont pas recouvertes d’éléments, certaines peintures ont l’air de captures prises au microscope. On croit voir des amibes et leurs cils. Brusquement tout un monde de bactéries envahit les perles et les colliers. Les microbes, virus et autres parasites de la gale se glissent entre les faux diamants et les paillettes dorées. La contamination visuelle est telle que l’on ne peut plus regarder un de ces tableaux sans y voir la purulence plus ou moins avancée de ce monde microscopique.

Les œuvres de petites tailles sont les plus gravement atteintes, leurs surfaces où abondaient joyaux, jais et ébène, quelques minutes auparavant, ne sont plus que de grosses cloques de pus brûlées. On repart à demi amusé de la plaisanterie mais sans  savoir à quel point elle était prévue.