Une collection particulière est toujours sérieuse. On le ressent à chaque exposition de ce genre, rien n’y est laissé au hasard, cohérence et obsessions sont maîtres-mots. Dans l’ensemble réuni à partir de la collection d’Antoine de Galbert, les deux premières œuvres donnent l’alpha et l’oméga. Tout d’abord une œuvre de Ben, comme pour prévenir que quoi qu’il advienne au cours de cette exposition, tout cela ne sera jamais que de l’art. Puis Boltansky et son Cœur – une ampoule battant le pouls – qui nous ramène illico à nos contingences, qui, elles, n’ont rien de cynique.

Dans la foulée, le Crucifix de Jan Fabre – tout de scarabées – pose la question du spirituel et du temporel, Lévêque et Alberola scandent Esperance et Vous allez tous nourrir. Une foule de questionnements surgit, la foi, la mort, l’existence, et l’art dans tout ça ? Toute l’exposition s’empresse de resserrer autour de nous ces questions que l’on évite au quotidien.

Après ces prémices, ces légers souffles faisant place au doute, le second espace transforme la question en pulsion. Ici la mort et la vie sont incarnés viscéralement. Dans le sang pour Herman Nitsch et Serrano, par le refus et la négation avec Thierry de Cordier. Mais ces élans sont immédiatement freinés par une scénographie pleine de tempérance qui choisit cet instant pour introduire Opalka et Fontana au parcours. Le désespoir décompté du premier et la fureur contrôlée du second temporisent l’envolée qui précède. Ces toiles blanches, aux gestes maintes fois répétés font de la main de l’artiste la main de dieu. Pour autant l’exposition ne devient pas légère. Même si Guillaume Treppoz se force à sourire dans un Autoportrait où il se scotche les commissures des lèvres pour les tirer vers le haut. Ironie et positivisme mis de coté, l’artiste prend les choses en main. Tout comme Eugene Leroy et Franz West. Chez le premier la matière faite chair se lève et ressuscite l’artiste, chez le second elle est recouvert d’une plaque de verre et l’on peut dîner dessus. Chez l’un comme chez l’autre la matière n’est pas agressive, elle n’est pas non plus violentée, elle est domptée.

Tout à la fin, deux installations transforment une dernière fois la question. Blaster Podest de Clement von Wedemeyer est constituée d’une estrade avec des fauteuils, une caméra et des éclairages, toute la panoplie de la communication dans ce qu’elle a de plus mécaniquement manipulatrice. Mais cette fois le discours n’a pas dû passer. Le sol est jonché de feuilles volantes, certains objets sont renversés voire brisés. Quelqu’un a cessé d’accepter la soupe qui se déversait devant lui.

Reflecting Sunset de David Claerbout souligne l’attraction de l’image sur l’événement, on y voit un coucher de soleil par procuration via son reflet dans une baie vitrée. En même temps que l’artiste souligne le danger de fixer le soleil, il met en avant la beauté de la transformation qu’opère parfois le pas de coté que nous effectuons pour nous protéger des choses. Le soleil brûle les yeux, son coucher est une image d’Epinal, le verre en déforme le reflet, et tout cela se terminera en moins de cinq minutes. Parfaite œuvre pour conclure la visite, la mort y est faible et imparfaite, belle parce que fausse, rassurante.