L’été est toujours propice aux expositions collectives. Les visiteurs y viennent comme ils s’installent dans les aires d’autoroutes, consomment, prennent la température, et repartent après avoir décidé s’ils reviendront ou non sur la route du retour.

La Circa Gallery l’a bien compris en ouvrant l’exposition avec l’installation plein d’évocation de khadja Baker. Où, quoi qu’en dise l’artiste, les Traces de performances (sable) ont avant toutes autres choses un petit goût d’iode. Les réminiscences de plages, l’odeur des vagues et des galets chauds règnent dans ce petit mètre carré de sable blond. L’artiste prudente indique que les traces que l’on y voit ne sont pas celles laissées par un match de beach-volley volley mais celles d’œuvre d’art. Certes, et pourtant impossible de s’empêcher de penser aux vacances d’été, à ces pâtés de sable, aux soirées autour des bouteilles de vin rafraîchies par une journée dans l’eau abandonnées, mais aussi à toutes ces choses que l’on ne peut pas vraiment faire au mois août à Montréal. Et ce n’est pas plus mal ainsi.

Plus loin sont accrochés deux tirages de Sara Lucas. On ne peut qu’y deviner l’artiste (sa tête n’apparaît pas). Comme souvent chez elle, ses œuvres sont ostentatoirement suggestives. Mais les suggestions sont clairement construites par l’artiste ; elles se rapportent à ce que les visiteurs connaissent d’elle, de ses engagements, de ses provocations. Ici un pistolet en plastique glissé dans son pantalon, là, une posture évocatrice ; habillée d’un juste au corps blanc, l’artiste ouvre les jambes sur sa braguette ouverte.

À leurs côtés les peintures de Louis-Philippe Côté associent flou poudreux et formes découpées au scotch ce qui provoque des ruptures saisissantes dans la composition des tableaux. On y verrait presque des collages. Mais rien dans la narration ne vient corroborer ce sentiment, l’atmosphère guerrière et violente, banale, nous ramène les pieds sur terre.

Servez vous est une installation de Kesso Line Saulnier. Elle se construit autour d’un tas de vêtements trouvés. À lire la pancarte il n’y a qu’à se pencher et choisir celui que l’on veut emmener. Mais le bras du visiteur est retenu par le strict recensement affiché en face de la pile de linge. Chacun d’entre eux y est décrit et numéroté selon un protocole établi. Ces fripes sont à la fois abandonnées et chiffonnées, rationnalisées et répertoriées. S’il devait n’en manquer qu’un seul cela se verrait immédiatement.

Plus loin, Floor area of musique plus: 99 x 81 feet de Sheena Hoszko est une bâche en papier kraft roulée et pliée sur elle-même. En voyant ces multiples circonvolutions on comprend qu’une fois étendue elle recouvre une grande surface. Mais pour le moment on ne peut que l’imaginer. On devine néanmoins que l’on y a dansé. Par endroits les foulées ont laissées des traces, le papier est déchiré et rapiécé. Pour peu que quelqu’un allume le son cette piste de fortune est prête à l’emploi. Une sorte de métaphore de l’art contemporain à l’usage des visiteurs. L’art étant toujours prêt à l’emploi, pour peu que l’on décide d’y mettre le doigt.