Le paysage est une question d’actualité. L’exposition en cours à la Galerie Alain Gutharc en assemble quelques uns créant un patchwork dans lequel on ne pénètre pas. Plus que des paysages ce sont des morceaux de paysages que l’on contourne en visitant l’exposition. Des images pleines de résonances mais dans lesquelles on ne met pas le pied. À chacun de former son propre paysage.

Au premier abord Guillaume Janot sembler photographier des sommets montagnards, des paysages de toit du monde pris au plus près. Ces images minérales sont glacées par l’air frais et vivifiant qui les entoure. Mais la texture de ces pics rocheux a quelque chose de trop uniforme, de trop sablée. En s’approchant le doute grandi, jusqu’à que ce l’on se rende compte qu’il ne s’agit que de faux rochers. Vincennes indique le cartel. De la montagne industrielle, urbaine en définitive.

Mais toutes les photographies de l’exposition ne sont pas trompeuses. Le paysage breton de Véronique Ellena est un morceau de falaise où l’herbe, poussée à rebrousse poil par le vent, dessine par sa base – un peu plus clair – des auréoles souples et ondulantes au dessus de la mer. Ici, la végétation remplit tout le cadre de la photographie et évoque la sensation que l’on a en glissant ses doigts dans les poils d’un chien ou d’un chat. Le paysage se fait alors animal, mais de couleur verte, aux herbes drues, et dans lesquelles le souffle humide des côtes bretonnes s’engouffre et le ponce. De l’autre côté, le visiteur hésite entre la douceur de l’image et la brutalité inamovible du paysage.

Le travail de Guillame Linard-Osorio pousse encore plus loin les écarts d’échelles. Son paysage est composé de quelques planches de contre-plaqué adossées au mur de la galerie. Rien ne les distingue du matériel de construction que l’on peut trouver dans n’importe quelle grande surface de bricolage. Rien si non des nœuds un peu plus gros que d’habitude. C’est l’artiste qui les a incrustés. Ils sont faits de bois fossilisé, une matière très dense et opaque sur laquelle se laissent encore deviner les veines noircies de l’arbre pétrifié. La transition entre les deux matériaux est à peine visible, on passe sans s’en apercevoir de l’aggloméré sans qualité au vestige millénaire. Une façon de relativiser la perception souvent grandiloquente de la nature que peuvent avoir les artistes. Guillame Linard-Osorio la réduit à sa surface la plus simple, tellement pauvre que l’on marcherait dessus si l’œuvre était à terre. Et pourtant, même dans ce cas la tension entre le nœud et les cernes resterait vive.