R. H. Quaytman  construit une œuvre complexe et soumise à un déroulement structuré en chapitres. L’exposition présenté à la Kunsthalle de Bâle regroupe les chapitres 20 et 2. C’est peu dire que rien n’y est laissé au hasard. Dans ses écrits l’artiste ficelle à un tel point son travail que l’on l’imagine impénétrable. Ce qui est à demi vrai. Car une fois face aux tableaux en question, leur magnétisme se met à capter notre regard avec insistance.

Au premier abord on ne distingue pas tellement quels sont les matériaux utilisés par l’artiste. Après vérification on comprend que la méthode est complexe et superpose différentes techniques. Ces œuvres sont des sérigraphies, et pour partie, peintes sur un support en bois dont les angles biseautés donnent à la tranche son aspect stratifié. Elles associent des impressions aux couleurs réduites, le plus souvent en brun, noir et blanc, à des images construites à partir de photographies, des diagrammes abstraits, des illusions optiques, et exceptionnellement des formes molles tracée à la peinture à l’huile. Parfois une ou deux couleurs supplémentaires viennent irradier la scène.

Face à elles il est insoluble de se demander ce qu’elles sont. Rien de vraiment impressionnant ici ; rien d’époustouflant, sinon l’intense concentration que l’on sent grandir en soi à mesure que l’on traverse l’exposition. L’artiste utilise beaucoup de grilles et de bandes qui pénètrent dans les images qu’elles créent. On devine des espaces intérieurs, des paysages, des coins de murs et partout cette texture de papier journal fraîchement encré, lisse, et légèrement velouté. Certaines sont méticuleusement barrées de trois lignes rouge-vert-bleu, d’autres sont ratissées sur toute leur surface. L’artiste utilise ainsi un certain nombre d’outils visuels pour piéger l’attention et lier les œuvres entre elles.

Celles-ci nous attirent parce qu’elles n’ont justement rien à dire. Malgré, et en plus de la méthode qui épaissi leurs mystère, elles n’appellent à aucune aide verbale. Essayer de les déchiffrer est un casse tête, et bien que l’on y parvienne on retourne encore et toujours à l’observation béate qui nous frappe face à elles. Leur langage est imprimé, écrasé sur la surface des planches de bois qui les supportent, il est illusoire de croire que l’on puisse les en déloger. Elles n’appellent même pas la main, seul l’œil est convoqué. Il règne en ermite parmi ces plans associés.