Les trois salles de l’espace Saint Claude de la galerie Perrotin sont investies par le duo Elmgreen et Dragset. Comme à ses habitudes il met en place un environnement trouble et distant, trouble parce que seul le doute semble l’habiter, et distant parce que rien en lui ne nous invite. Cette fois le scénario à un air de fait divers, les salles se suivent et se visitent comme les articles d’un journal, brèves descriptions à l’appui.

On pénètre tout d’abord dans une grande pièce en longueur, bourgeoise, et strictement décorée de pacotille. Au fond une imposante cheminée de faux marbre sert de refuge à un petit garçon recroquevillé entre ses genoux. On retrouve le même petit garçon au-dessus de la cheminée son portrait peint plus grand que nature. Sur la peinture il arbore un sourire inquiet, son regard de biais et humide indique à quel point la séance de pose a du lui sembler pénible. En se retournant, après avoir observé le modèle et son image, on remarque une console disposée près de la sortie. Sur celle-ci on a disposé un bouquet de fleurs encore emballé. Et juste au-dessus est suspendu miroir doré recouvert d’une inscription manuscrite : « I will never see you again ! ».

La seconde salle dans laquelle les artistes nous invitent à pénétrer est une morgue.  Quatre fois quatre tiroirs recouvrent le mur du fond, l’un d’entre eux est ouvert et sur son plateau repose un corps. Les pieds et la pilosité des chevilles nous indiquent qu’il s’agit d’un homme d’un certain âge, le reste du corps est recouvert d’un drap. Dans cette pièce de petite taille, on trouve également un lavabo et une blouse, ainsi qu’un écran lumineux pour lire les radios sur lequel on peut observer l’image bleu et blanche d’un crâne.

Sans réelle transition, on zappe vers la dernière salle qui nous transporte à l’intérieur d’un garage du genre étroit, de ceux qui ne peuvent contenir qu’une seule voiture. Au milieu, un scooter beige est garé, une petite étagère et quelques objets usuels occupent le reste de l’espace. Sur le porte-bagages de l’engin une cagette a été amarrée à l’aide de tendeurs, elle contient un poupon emmailloté.

L’exposition consiste en ces trois descriptifs froids et quasi littéraires. À chaque fois il nous est impossible de réellement envisager ce qu’il se passe, les éléments ont beau être forts, ils restent complètement factices. Les histoires qui nous sont racontées n’ont certainement que peu d’importance ; c’est la matière même du récit qui est ici exposée, une matière à laquelle les deux artistes ont enlevée tout pouvoir suggestif pour n’en garder que la théâtralité stérile.