C’est une exposition courageuse que propose la Réunion des Musées Nationaux. Elle se penche sur cette période charnière en France qu’a été le tournant du XVIe siècle, et n’hésite pas à nous présenter le val de Loire et la Bourgogne comme de grands centres artistiques hexagonaux. Un programme qui demande un peu de suite dans les idées.

Après quelques introductions, est exposé un large triptyque de Jean Poyer, peintre connu des spécialistes comme étant l’un des artistes les plus célèbres en son temps. Il n’est pas dit qu’on l’aurait deviné. Mais ce grand polyptique présente une synthèse particulièrement agréable de l’art italien et nordique, avec des coloris très clairs, où les blancs ont le poids de la pierre et la lumière invasive celui de la Méditerranée. Plusieurs niveaux de narration s’emboîtent avec aisance dans cette composition que l’on finit par trouver ambitieuse.

A peine plus loin, on trouve un important corpus du peintre de Moulins, récemment reconnu sous le nom de Jean Hey. De nombreuses œuvres sont présentes, et la plupart reconstituée à partir de divers fragments dispersés au fil des siècles. Cet ensemble est accompagné d’un dessin de tête de femme, plein de grâce. On ne peut pas dire que ce soit une intense épiphanie, mais on est tout de même heureux de se voir montrer autres choses que les éternelles et minuscules enluminures que l’on voit habituellement quand il s’agit de cette période.

Les sculptures sont dans cette exposition particulièrement bien mises en valeur.  Elles disposent d’espaces clairs et vastes où une lumière chaude vient se poser avec précision. Les sculptures de Jean Guihomet dit de Chartres, qui en plus de s’élever à l’échelle un, sont montées sur un rebord, donnent une solennité à la visite, on se croirait presque dans un cloître. On déambule ainsi, autour des groupes de sculptures, dont l’audacieuse expressivité des traits crée des dynamiques et des rythmiques où les figures, tout en étant imprégnées de spiritualité, se dandinent.

A l’étage, la visite se poursuit avec des objets d’usages plus intimes, bien que toujours imprégnés d’une vision politique et de représentation. S’y trouvent entre autre, meubles, médailles, bustes  et portraits, ainsi que d’amusants plans d’architecture qui semblent avoir été réalisés en même temps que les édifices qu’ils figurent.

Heureusement il ne s’agit pas ici de traverser des salles remplies de tapisseries jusqu’à l’étouffement, ni de s’abîmer les yeux sur des kilomètres de manuscrits austères. L’exposition dépoussière une frange de l’histoire sans pour autant nous assommer avec.