La galerie Yvon Lambert, qui semble vouloir montrer ses muscles en ces temps d’austérité et de retour aux bases, vient d’inaugurer un accrochage des derniers travaux de l’artiste américaine Louise Lawler.

Dans le vestibule face à l’accueil, une photo. Elle a pour arrière-fond une fresque que l’on devine italienne, peut-être même florentine. Une seule chose est sûre, elle ne se trouve pas dans son contexte d’origine.

Dans la seconde salle, la même photographie est exposée sur la quasi-totalité de la pièce. Etirée en largeur elle ressemble à une immense œuvre abstraite. Elle n’est plus que longues traînées blanches, vertes, ocre et bordeaux, qui courent sur les parois de la galerie. Ici l’artiste nous pousse encore un peu plus loin dans son approche de la dématérialisation des œuvres, en nous montrant que c’est en en perdant le sens que nous finissons par la voir. Sur un pan de mur épargné par la pulvérisation est accrochée une autre photographie. Et elle aussi se retrouve agrandie dans la pièce suivante. Cette fois-ci sans déformation. La composition, faîte d’orchidées, de livres et de sculpture antique, nous apparaît parfaitement maîtrisée. Mais là encore, on ne sait si l’on voit vraiment.

Dans cette dernière salle se trouvent d’autres clichés pris dans des intérieurs richement meublés, et caractéristiques du travail de l’artiste. Ils sont baignés d’une même lueur or. On y distingue, ici et là, quelque œuvres, on reconnait un style, un genre, comme souvent dans les photographies de Louise Lawler. Puis, on se rend compte que presque toutes les images sont présentées deux fois. On ne s’en aperçoit pas immédiatement tant les photos accrochées en désordre nous semblent habituels. Cette répétition une fois repérée nous secoue. Pris en flagrant délit de nonchalance, coupable d’un regard passif, habitué à ces photographies, qui elles même travaillent sur l’habitude dans l’environnement des œuvres d’art. Elle nous rappelle brusquement que nous bégayons sans nous en apercevoir, et que l’art est répétitions.