Chez Emmanuel Perrotin sont présentés 17 noms pour autant de postures possibles dans la peinture abstraite contemporaine. Cette exposition collective aux allures de parade éclectique se déploie dans tous les espaces de la galerie et étrenne le second étage de la rue de Turenne.

Fort de l’agrandissement estival de sa superficie, la galerie propose pratiquement un artiste par salle, du coup peu de confrontations ont lieu au cours de la visite. Seul Bernard Frize, Bharti Kher et Ernan Bas dans la première salle et Murakami et Lee Ufan dans la suivante et Sergeil Jensen, Tauba Auerbach et Matthew Day Jackson au premier étage ont un vis-à-vis. C’est un peu dommage mais c’est pourtant souvent ainsi : plus d’espace signifie moins d’interactions. Néanmoins chacun occupe avantageusement la chambre qui lui est assignée. Ainsi, Rutault profite de la vue et s’installe à l’étage ; Uklanski en maître des lieux décline au rez-de-chaussée son savoir-faire en rouge et blanc mais aussi, et c’est nouveau, dans des tons rompus ; l’accrochage d’Armleder brille de mille feux et celui d’Olivier Mosset, espace Saint-Claude, prend des airs de chapelle. Pas beaucoup de surprise donc.

Que dit cet assemblage ? Dans un premier temps on peut observer que la peinture abstraite chez Perrotin n’est pas particulièrement chatoyante, à l’exception notoire de celles qui usent de paillettes, même Murakami – qui fait pourtant partie de ces exceptions – a choisi de pratiquement se passer de couleur. Ailleurs les tons coupés, gris, beiges et autres demi-teintes sont de mise. Martin Wöhrl excelle dans cet exercice avec ses assemblages que l’on pourrait croire issus du recyclage de tables en formica. L’ensemble est ainsi drapé d’une certaine austérité, probablement de bon aloi par les temps qui courent. De même, ces peintures ont de grandes propensions pour la géométrie et ses dérivés. Un penchant qui aiguise encore un peu plus l’effet de rigueur général.

L’exposition qui aurait pu être l’occasion pour la galerie de montrer ses muscles en reste à une simple énumération de ses forces vives, et celles-ci ont quelque peu l’air d’être économiquement orientées. Rien de plus normal pour une galerie ? Gageons tout de même que par la suite un peu plus de folie soit sollicitée dans les accrochages.